Médecine vétérinaire: un centre d’excellence en médecine interventionnelle unique au Canada
- UdeMNouvelles
Le 12 mars 2024
- Martin LaSalle
Unique au Canada, le nouveau centre d’excellence en médecine interventionnelle de la Faculté de médecine vétérinaire de l’UdeM permet des interventions spécialisées peu invasives sur les animaux.
Il y a un an, Stella, une chienne de race schnauzer miniature âgée de six ans et demi, a subi une chirurgie au cours de laquelle on lui a enlevé les calculs qui s’étaient formés dans sa vessie. Quelques jours après, la plaie de l’animal s’est ouverte après qu’il eut sauté inopinément en bas du divan familial, ce qui lui a valu douleur et saignements… et une visite additionnelle chez son vétérinaire.
Récemment, d’autres calculs se sont formés dans la vessie de Stella, mais ses propriétaires ne souhaitaient pas lui faire subir la même intervention. Leur vétérinaire leur a parlé d’une nouvelle procédure peu invasive pratiquée au Centre hospitalier universitaire vétérinaire (CHUV) de l’Université de Montréal, situé à Saint-Hyacinthe.
Le 22 février, Stella a été confiée à la Dre Marilyn Dunn, qui est à l’origine du Centre d’excellence en médecine interventionnelle (CEMI) du CHUV. Le CEMI a pu voir le jour grâce, entre autres, à un don d’un million de dollars de la compagnie Royal Canin Canada et un autre de 200 000 $ de l’entreprise pharmaceutique Boehringer Ingelheim Santé animale Canada, qui ont permis l’acquisition des appareils médicaux nécessaires.
Ces dons s’inscrivent d’ailleurs dans le contexte de la grande campagne philanthropique L’heure est brave, lancée récemment par l’Université.
Offrir un service en continu et de la formation
L’intervention assistée par imagerie consistait à insérer, par le système urinaire de l’animal, une caméra jusqu’à la vessie afin de repérer les calculs et de les fragmenter à l’aide d’un laser. La fragmentation permet d’extraire plus facilement les calculs par les voies naturelles, sans devoir effectuer d'incision.
Crédit : Amélie Philibert, Université de MontréalFaisant appel à des technologies de pointe comme l’endoscopie, l’angiographie et la fluoroscopie, le CEMI est unique au Canada. Aux États-Unis, il n’existe que trois centres vétérinaires dotés de ces équipements.
Le CEMI permet de traiter un plus grand nombre de patients, puisque les médecins vétérinaires Marilyn Dunn et Catherine Vachon sont en mesure d’offrir une gamme d’options diagnostiques et thérapeutiques touchant les systèmes respiratoire, cardiovasculaire et urinaire chez les animaux domestiques tout comme ceux vivant dans la nature, dans un zoo ou à la ferme.
Muni entre autres d’une table de fluoroscopie, d’un système d’écrans et d’un système d’anesthésie intégré, le CEMI sert aussi à former les étudiants et étudiantes en médecine vétérinaire «ainsi que les vétérinaires de partout dans le monde souhaitant se spécialiser dans ces types d’interventions ou se familiariser avec ces soins», souligne la Dre Dunn, qui est aussi membre fondatrice de l’American College of Veterinary Nephrology and Urology et de la Veterinary Interventional Radiology and Interventional Endoscopy Society.
Des interventions peu invasives
Les appareils et les équipements acquis grâce aux dons permettent aux vétérinaires de réaliser des interventions peu invasives au cours desquelles ils suivent leurs manœuvres en temps réel à l’écran.
Ce fut d’ailleurs le cas pour Stella, opérée par le vétérinaire résident Corentin Treich sous la supervision de Marilyn Dunn.
«L’intervention assistée par imagerie consistait à insérer, par le système urinaire de l’animal, une caméra jusqu’à la vessie afin de repérer les calculs et de les fragmenter à l’aide d’un laser, explique la Dre Dunn. La fragmentation permet d’extraire plus facilement les calculs par les voies naturelles, sans devoir effectuer d’incision.»
Par la suite, l’appareil à rayons X en forme de C scrute l’animal étendu sur la table de fluoroscopie et renvoie sur un autre écran l’image vidéo de l’intérieur du chien. Cela permet de s’assurer que tous les calculs ont bel et bien été enlevés.
Contrairement à la première intervention chirurgicale et à la convalescence qui s’en est suivie pour Stella et ses maîtres, l’intervention effectuée au CEMI n’a laissé aucune trace.
«Habituellement, une chirurgie pour enlever des calculs à la vessie requiert une convalescence de 14 jours et l’administration d’antidouleurs, suivies du port d’un cône pour empêcher l’animal d’atteindre sa plaie, remarque Marilyn Dunn. Grâce à l’intervention par endoscopie, il n’y a pas de plaie et, dans le cas de Stella, elle est sortie de l’hôpital le jour même et ses propriétaires auraient pu aller la promener au parc pour chiens en soirée!»
Un service qui répond à un besoin
Professeure à l’Université de Montréal depuis 2002 et spécialisée en médecine interne des animaux de compagnie, Marilyn Dunn s’intéressait à la médecine d’intervention avant même qu’on la pratique à la Faculté de médecine vétérinaire.
«Cette année-là, nous avions un patient dont la trachée s’était affaissée et qui ne répondait pas aux traitements; nous avons demandé à des médecins que nous connaissions s’ils pouvaient nous procurer des stents expirés utilisés pour dégager des bronches de bébés, relate-t-elle. Nous nous en sommes servi sur notre patient et cela a fonctionné!»
Ce fut la toute première pose de stent trachéal effectuée sur un animal au Canada!
Ce cas l’a motivée à aller plus loin et à se spécialiser en interventions guidées par imagerie à des fins diagnostiques, un domaine peu exploré à l’époque. En 2008, elle fait un postdoctorat à l’Université de Pennsylvanie sous la direction du Dr Chick Weisse et d’Allyson Berent.
À son retour, elle crée le Service de médecine interventionnelle de l’Hôpital des animaux de compagnie du CHUV.
«Nos appareils ont fini par nous limiter dans nos interventions et de là est née, en 2016, l’idée de créer un centre d’excellence en médecine interventionnelle, poursuit la Dre Dunn. Nous avons établi un budget et sollicité des clients et différentes entreprises pour recueillir des fonds.»
La suite fait désormais partie de l’histoire, mais si le CEMI existe, c’est surtout pour répondre à un besoin exprimé par les propriétaires d’animaux.
«Nos clients sont nos plus grands ambassadeurs, car ce sont eux qui demandent que leur animal soit opéré de manière la moins invasive possible, conclut Marilyn Dunn. Et la médecine interventionnelle contribue à améliorer le confort de nos patients tout en réduisant leur temps de convalescence.»
Pour visionner la vidéo dans laquelle une autre chienne, Peggy, a aussi été traitée au CEMI pour un uretère ectopique, c'est par ici.