Implantation cochléaire: les bienfaits de l’initiation à la langue des signes
- UdeMNouvelles
Le 25 avril 2024
- Béatrice St-Cyr-Leroux
Chez les enfants sourds, l’initiation à la langue des signes avant et après la pose d’un implant cochléaire améliorerait leurs compétences linguistiques et cognitives.
Certains chercheurs et cliniciens conseillent aux parents d’enfants en attente d’une implantation cochléaire et dont la surdité a été diagnostiquée à la naissance, ou peu de temps après, de se concentrer exclusivement sur la langue orale.
On pourrait croire que l’initiation à la langue des signes accapare les aires du cerveau vouées à l’apprentissage de la langue orale. On estime alors que l’implantation aurait moins de chances de réussir en raison de la «prise de contrôle visuelle» des voies neurologiques typiquement consacrées à l’audition.
Or, une récente étude met en lumière que l’initiation à la langue des signes avant et après l’opération peut avoir des effets positifs sur la langue parlée et les capacités de mémoire phonologique des enfants sourds porteurs d’implants cochléaires.
L’étude a été menée par Audrey Delcenserie, étudiante de doctorat en neuropsychologie dirigée par François Champoux, professeur à l’École d’orthophonie et d’audiologie de l’Université de Montréal. La doctorante a comparé les habiletés langagières d’enfants sourds initiés à la langue des signes avant et après l’implantation cochléaire avec celles d’enfants sourds jamais initiés à cette langue et avec celles d’enfants entendants.
«Nos résultats montrent qu’une initiation précoce à la langue des signes améliore non seulement les compétences en vocabulaire parlé, mais aussi la morphologie, la conscience phonologique, la mémoire phonologique et la grammaire expressive», indique Audrey Delcenserie.
Prévenir des déficits langagiers
La chercheuse encourage donc les parents à apprendre la langue des signes ou à y initier leur enfant sourd depuis la naissance en raison des bienfaits sur le développement du langage et de la mémoire. Cette familiarisation éviterait aux enfants sourds de faire face à une privation linguistique complète, mais aussi d’avoir à contrer les effets indésirables liés à un retard dans l’acquisition langagière.
«Sans une communication visuelle, les enfants sourds à la naissance sont privés de toute forme de communication. Or, nous savons que la familiarisation précoce à une langue permet d’activer les systèmes neurocognitifs innés qui sous-tendent le langage. Et la période propice à l’activation de ces systèmes se situe dans les 12 premiers mois de vie», précise Audrey Delcenserie.
La doctorante ajoute que l’initiation à la langue des signes a également des bienfaits cognitifs et sociaux, même après l’implantation cochléaire. «On parle alors de bilinguisme multimodal et cela permet des fonctions exécutives comme la capacité de passer d’une langue à l’autre», souligne-t-elle.