Style de vie et choix politique: vos préjugés peuvent-ils être exacts?

Selon une nouvelle étude menée par Catherine Ouellet, les gens seraient généralement en mesure de deviner les préférences politiques des autres en basant seulement leur jugement sur certaines habitudes de vie.

Selon une nouvelle étude menée par Catherine Ouellet, les gens seraient généralement en mesure de deviner les préférences politiques des autres en basant seulement leur jugement sur certaines habitudes de vie.

Crédit : Getty

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Une étude a examiné comment certaines caractéristiques du mode de vie influencent les jugements des gens quant à l’allégeance politique des autres, mais aussi dans quelle mesure ils sont justes.

Pouvons-nous détecter les préférences politiques des autres en nous basant sur leur style de vie? Est-ce que certaines caractéristiques, comme le type de voiture conduite ou les loisirs, seraient associées à différents partis politiques?

Il semblerait que oui.

Selon une nouvelle étude menée par Catherine Ouellet, professeure au Département de science politique de l’Université de Montréal, les gens seraient généralement en mesure de deviner les préférences politiques des autres en basant seulement leur jugement sur certaines habitudes de vie.

Pour parvenir à cette conclusion, la chercheuse s’est d’abord intéressée à la manière dont les individus s’appuient sur divers attributs du mode de vie pour se faire une opinion quant au vote d’autrui. Ces données ont ensuite été comparées avec celles recueillies par le Datagotchi, une application cocréée par la chercheuse qui prédit le vote des utilisateurs en fonction de variables sociodémographiques et d’aspects liés au style de vie.

Trois partis politiques québécois ont été analysés: à droite, le Parti conservateur du Québec (PCQ), à gauche Québec solidaire (QS) et, plus au centre, le Parti libéral du Québec (PLQ).

Dis-moi ce que tu conduis, je te dirai pour qui tu votes

Catherine Ouellet

Catherine Ouellet

Crédit : Amélie Philibert, Université de Montréal

Les résultats montrent que conduire une camionnette, pratiquer un sport de plein air motorisé ou aller à la chasse augmenteraient la probabilité que le profil soit désigné comme un partisan du PCQ. Et boire des cafés lattés – plutôt que des cafés filtre – diminuerait cette probabilité. Fait intéressant: les habitudes des sympathisants du PCQ sont analogues à celles des abstentionnistes.

De l’autre côté du spectre, la visite de musées et de galeries d’art serait, de loin, l’indicateur le plus puissant d’un vote en faveur de QS. Le portrait stéréotypé de l’électeur du PLQ semble plus ambigu, puisqu’aucune caractéristique présentée dans les profils ne pointe de manière significative vers ce parti, à l’exception de la pratique de sports motorisés, qui diminue la probabilité d’y adhérer.

«À la lumière de ces résultats, on voit que des attributs précis permettent effectivement de tirer des conclusions qui s’avèrent souvent exactes», indique Catherine Ouellet.

Une réflexion sociologique

Même s’il est évident qu’il n’existe pas de corrélation directe entre le café latté et un vote à gauche, pourquoi y a-t-il un lien entre le mode de vie et l’allégeance politique? Pour Catherine Ouellet, l’explication est relationnelle.

«Nous savons que les êtres humains ont tendance à aller vers des gens qui leur ressemblent, qui partagent des caractéristiques communes comme la langue, la culture, les valeurs, les choix musicaux, le milieu sociodémographique, etc., affirme-t-elle. Ensuite s’exerce un effet autorenforçant de l’influence sociale, c’est-à-dire qu’en passant du temps avec certaines personnes on finit par développer une vision du monde plus ou moins commune.»

Selon la chercheuse, des microgroupes finissent ainsi par penser plus ou moins de la même façon, et cette convergence d’opinion se transpose dans les attitudes et les préférences politiques.

La professeure note d’ailleurs qu’à l’ère des médias sociaux, où «la polarisation idéologique et affective est de plus en plus marquée», les liens entre styles de vie et politique semblent s’accroître. Une question qu’elle souhaite approfondir dans des contextes culturels différents, notamment aux États-Unis et au Japon.

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