L’écologie au cœur des projets d’aménagement
- UdeMNouvelles
Le 7 août 2024
- Virginie Soffer
Shabnam Rahbar explore les pratiques écologiques en aménagement du paysage au Québec à travers l’étude de 10 projets d’envergure.
On parle d’écoquartiers, d’écoconstruction, d’éthique environnementale, etc. Le terme écologie semble être sur toutes les lèvres des professionnels de l’aménagement et des chercheurs du domaine. Pourtant, Shabnam Rahbar, professeure adjointe à l’École d’urbanisme et d’architecture de paysage de l’Université de Montréal, trouve que ce concept reste flou et ambigu. Cette constatation l’a incitée à examiner comment les architectes paysagistes québécois intègrent l’écologie dans leurs travaux. Elle a ainsi entrepris cet été un projet de recherche qui vise à jeter un nouvel éclairage sur les pratiques écologiques en architecture de paysage au Québec et, accompagnée de deux auxiliaires d’enseignement, elle étudie 10 projets d’aménagement du territoire québécois.
Mieux comprendre comment l’écologie se retrouve au cœur de l’aménagement
Dans un premier temps, Shabnam Rahbar a passé en revue la littérature et s’est renseignée sur les différentes discussions contemporaines portant sur l’écoconception (ou ecodesign en anglais). «J’aimerais mieux examiner comment ces réflexions et théories sur l’écoconception dessinent les contours d’une pratique écologique de paysage. J’aimerais aussi établir comment les notions écologiques sont comprises et utilisées aujourd’hui par les architectes paysagistes québécois en explorant les similarités et divergences dans leurs discours. À partir de ces études, je souhaite faire émerger des principes et stratégies d’aménagement permettant aux paysagistes de créer une relation symbiotique, juste et soutenable avec la nature, favorisant un dialogue entre les interventions paysagères et les dynamiques naturelles», explique-t-elle.
Une approche techniciste qui prévaut
Shabnam Rahbar observe que l’approche techniciste domine souvent les projets dits écologiques. Cette tendance se manifeste dans les outils d’évaluation environnementale tels que la certification LEED Or et les commandes publiques, qui mettent l’accent sur des solutions techniques comme la gestion de l’eau de pluie, la décontamination des sols ou la réutilisation des matériaux. Bien que ces solutions soient nécessaires pour répondre aux présentes crises environnementales, elles ne s’attaquent pas aux causes profondes, à savoir nos comportements à l'égard de la nature.
Selon elle et d’autres chercheurs, l’enjeu d’une écoconception devrait être le moteur d’un véritable changement culturel dans nos relations avec la nature. «Comme moi, des chercheurs disent qu’il faut vraiment, à travers ce concept, se questionner sur la façon d'établir une relation harmonieuse et durable avec la nature, sur la manière dont nos aménagements et nos interventions peuvent respecter la nature, la terre et voir comment nos aménagements peuvent respecter les écosystèmes et s’y intégrer», indique Shabnam Rahbar.
Étudier différents types d’aménagement du paysage
«En architecture de paysage, on parle souvent de paysages inachevés; ce sont des lieux non complètement maîtrisés, permettant à la nature de s’approprier l’espace à son propre rythme», souligne Shabnam Rahbar. Certains terrains abandonnés, comme c’est le cas du Champ des possibles, n’ont pas vraiment d’aménagement, ce qui permet à la nature d’évoluer librement, sans contrôle strict.
La gestion différenciée, utilisée pour une partie de la forêt du campus de la montagne de l’UdeM, prône quant à elle la diversification des réponses d’aménagement et d’entretien de l'espace. Cette approche permet de proposer des endroits bien entretenus où la nature est maîtrisée tout en laissant d’autres zones évoluer naturellement pour favoriser la biodiversité.
«Je pense que c’est intéressant de diversifier ainsi les types de paysages, les types d’espaces verts qu’on va avoir dans les villes et de proposer différents types d’entretien pour à la fois répondre aux besoins du public et respecter les besoins de la nature. Alors parfois, il y a des interventions minimales dans les endroits où l'on voudrait donner un coup de pouce à la biodiversité. Mais il y a des entretiens réguliers dans des lieux qu’on souhaite utiliser par exemple pour faire des piqueniques», dit la professeure.
Dix projets d’aménagement du paysage passés sous la loupe
Pour comprendre comment les architectes paysagistes québécois comprennent le concept écologique, Shabnam Rahbar a sélectionné 10 projets d’envergure, tous réalisé au Québec, et les étudie cet été. Cinq se situent dans la région montréalaise et cinq dans d’autres régions du Québec. Ces projets, qualifiés d’écologiques par leurs concepteurs et ayant obtenu des distinctions telles que des certifications écoresponsables, ont été choisis pour représenter un large éventail de pratiques avec des concepteurs de différentes générations.
Parmi les projets retenus figurent l’écoquartier du Technopôle Angus, le parc Frédéric-Back et la plage urbaine de Verdun à Montréal, ainsi que la promenade Samuel-De Champlain, la restauration écologique des berges de la rivière Saint-Charles à Québec, le parc de conservation du ruisseau de Feu à Terrebonne et le parc des Loups-Marins et la promenade de la Grave à Percé.