Consommation de cannabis à l’adolescence: des effets visibles sur la structure du cerveau
- Salle de presse
Le 23 octobre 2024
- UdeMNouvelles
Une étude collaborative met en lumière les conséquences de cette drogue sur le développement cérébral des jeunes, la principale étant une atrophie de certaines régions du cortex cérébral.
La consommation de cannabis entraînerait un amincissement du cortex cérébral chez les adolescents, selon une récente étude dirigée par Graciela Pineyro et Tomas Paus, chercheurs au CHU Sainte-Justine et professeurs à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal. Grâce à une collaboration entre deux laboratoires de recherche aux approches complémentaires, l’étude démontre que le tétrahydrocannabinol (THC), une substance active dans le cannabis, cause un rétrécissement de l’arborisation dendritique, un «réseau d’antennes» des neurones dont le rôle est critique pour la communication entre ces neurones. Cela aurait pour résultat une atrophie de certaines régions du cortex cérébral, une mauvaise nouvelle à un âge où le cerveau est en pleine maturation.
«Si l’on établit une analogie entre le cerveau et l'ordinateur, les neurones seraient le processeur central et celui-ci recevrait toutes les informations par le réseau de dendrites à travers les synapses, explique Tomas Paus, également professeur de psychiatrie et de neurosciences à l’UdeM. Donc une diminution de l’entrée de données vers le processeur central altère la capacité du cerveau à apprendre de nouvelles choses, à interagir avec les autres, à faire face aux situations nouvelles, etc. En d’autres termes, le rétrécissement du réseau de dendrites rend le cerveau plus vulnérable à tout ce qui peut survenir dans la vie d’un jeune.»
Une approche multiniveau pour mieux comprendre l’effet chez l’humain
Ce projet se démarque particulièrement par l’aspect complémentaire et multiniveau des méthodes utilisées. «Grâce à l’analyse des images obtenues par résonance magnétique [IRM] de cerveaux d’une cohorte d’adolescents, nous avions déjà montré que les jeunes qui ont consommé du cannabis avant l’âge de 16 ans avaient un cortex cérébral plus mince, indique Tomas Paus. Or, cette méthode de recherche ne permet pas de tirer de conclusions sur la causalité ni de vraiment comprendre l’effet du THC sur les cellules du cerveau.»
Devant cette limite de l’IRM, l’introduction du modèle murin de l’équipe de Graciela Pineyro a constitué un ajout essentiel. «Ce modèle a permis d’établir que le THC modifie l’expression de certains gènes agissant sur la fonction et la structure des synapses et des dendrites, précise la chercheuse, aussi professeure au Département de pharmacologie et physiologie de l’UdeM. Il en résulterait une atrophie de l’arborescence dendritique, responsable de l’amincissement observé dans certaines régions du cortex.»
Fait intéressant, ces gènes repérés chez la souris ont été aussi trouvés chez l’humain, en particulier dans les régions plus minces du cortex des adolescents de la cohorte qui avaient consommé du cannabis. En combinant leurs approches, Graciela Pineyro et Tomas Paus ont pu déduire avec un haut degré de certitude que les gènes ciblés par le THC dans le cerveau des jeunes et dans celui des modèles murins sont affectés de manière similaire.
À l’heure où la consommation de cannabis est en hausse chez les jeunes Nord-Américains et où les produits commerciaux de cannabis offrent des concentrations croissantes de THC, il devient impératif d’améliorer notre compréhension des effets de cette substance sur la maturation cérébrale et la cognition. La collaboration fructueuse des deux équipes de recherche, qui ont su mettre à profit des techniques de pointe en biologie cellulaire et moléculaire, en imagerie et en analyse bio-informatique, représente un pas dans la bonne direction pour l’élaboration de mesures efficaces de santé publique.
À propos de l’étude
L’article «Cells and Molecules Underpinning Cannabis-Related Variations in Cortical Thickness during Adolescence», par Xavier Navarri et ses collègues, dont Graciela Pineyro et Tomas Paus, a été publié dans le Journal of Neuroscience le 9 octobre 2024.
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