Négocier avec la rivière Sainte-Anne

Le documentaire permet de comprendre les inondations et les adaptations intégrées et innovantes, en plus d’informer le public et d’inspirer.

Le documentaire permet de comprendre les inondations et les adaptations intégrées et innovantes, en plus d’informer le public et d’inspirer.

Crédit : La recette Saint-Raymond contre les inondations, ARIaction

En 5 secondes

Valorisant une démarche de recherche-action et de sensibilisation auprès de la communauté de Saint-Raymond, qui s'est étendue sur près de 10 ans, une équipe de recherche lance un documentaire-exposé.

La rivière Sainte-Anne

Le système de retenue des glaces sur la rivière Sainte-Anne

Crédit : La recette Saint-Raymond contre les inondations, ARIaction

14 avril 2014. Au lendemain d’un énième caprice de la rivière Sainte-Anne, la municipalité de Saint-Raymond décide de s’organiser. La Ville communique alors avec la CAPSA (à l’origine la Corporation d’aménagement et de protection de la rivière Sainte-Anne), l’organisme de bassin versant des rivières Sainte-Anne, Portneuf et du secteur La Chevrotière, pour réfléchir à des stratégies viables d’adaptation et éviter les dommages liés aux inondations de la rivière Sainte-Anne tout en incluant les résidants dans le processus. «La Ville a demandé à la CAPSA comment travailler en collaboration pour transformer une catastrophe en occasion de réaménagement viable», relate Isabelle Thomas, professeure à l’École d’urbanisme et d’architecture de paysage de l’Université de Montréal. C’est ainsi qu’est né le Comité rivière.

Onze ans plus tard, cette mobilisation ne s’est pas affaiblie. «C’est la première fois que je rencontre un comité aussi motivé», remarque Emmanuel Campeau, réalisateur du documentaire qui retrace une décennie de démarches, de l’origine des inondations aux mesures mises en place et au travail des parties prenantes. 

«La municipalité a été exemplaire dans sa participation et par sa volonté de se transformer face à une rivière qui lui joue des tours en débordant de manière différente chaque fois», estime Isabelle Thomas, qui est directrice d’ARIaction, un groupe de recherche de la Faculté de l’aménagement de l'UdeM qui travaille sur la vulnérabilité, l’adaptation et la résilience des milieux de vie. La collaboration entre tous les acteurs, de la Ville au ministère de la Sécurité publique en passant par les organismes de bassin versant, les résidants et les universitaires, a été exemplaire.

C’est la Ville qui a organisé le lancement du documentaire le 6 mai. «Le lancement au cinéma local a été un moment émouvant et solennel, qui témoigne du fait qu’une catastrophe peut entraîner une métamorphose des territoires et renforcer la solidarité locale», ajoute la professeure.

De l’inondation à l’action

Isabelle Thomas et Emmanuel Campeau

Isabelle Thomas et Emmanuel Campeau

Crédit : Marie Torres

Saint-Raymond n’en était pas à sa première inondation. En 100 ans, la ville en aurait subi au moins 70, surtout causées par des embâcles qui s’accumulent au centre-ville. Celle du 14 avril 2014 a été particulièrement importante, touchant de 300 à 400 maisons et logements de même que l’hôtel de ville. Le maire (de l’époque et le suivant) comme les résidants décident de se relever les manches pour mieux se préparer au prochain débordement de la rivière Sainte-Anne. 

Soutenu notamment par le ministère de la Sécurité publique et le Cadre pour la prévention de sinistres, ce projet de recherche a été mené à bien par des chercheurs et chercheuses de l’Université de Montréal et de l’Université Laval et plusieurs étudiants et étudiantes d’Isabelle Thomas. Après avoir effectué des diagnostics de risques, l’équipe a participé à plusieurs assemblées publiques pour présenter les défis et pistes de solution, avant de proposer des mesures à mettre en place. «On a fait une analyse de vulnérabilité, réfléchi à l’adaptation et à la résilience, en collaboration avec les résidants», explique Isabelle Thomas. Ce travail collaboratif a permis de concevoir de meilleures interventions, alignées sur les besoins et les préoccupations des résidants.

Communiquer la recherche

Au lancement du documentaire

Le documentaire a été lancé le 6 mai au cinéma Alouette de Saint-Raymond.

Crédit : Ville de Saint-Raymond

De la bande dessinée aux cartes, les membres d’ARIaction cherchent toujours à utiliser des outils de communication variés afin de favoriser une sensibilisation efficace et équitable. «Le documentaire, on le réserve pour des projets de grande envergure, des projets champions», dit Isabelle Thomas. 

«Le documentaire n’est pas une fin en soi, mais une démarche», affirme Emmanuel Campeau. Le film d’une dizaine de minutes montre autant les mesures instaurées que le processus qui y a mené. En effet, la mobilisation de toute la communauté et l’engagement d’acteurs clés auront assuré l’acceptabilité sociale de ces mesures et, ultimement, leur succès. Carole Lépine, un des piliers du Comité rivière, fait partie de ces militants clés. «Elle a pris son bâton de pèlerin et a dit “Je vais faire des enquêtes”. Avec le Comité rivière, elle est allée voir les sinistrés et m’a signalé que des personnes âgées avaient besoin de soutien. C’est grâce à ces témoignages que les programmes des différents ministères sont bonifiés», raconte Isabelle Thomas. 

Un récit inspirant

La municipalité de Saint-Raymond

La municipalité de Saint-Raymond

Crédit : La recette Saint-Raymond contre les inondations, ARIaction

Donnant la parole aux acteurs locaux, le documentaire permet de comprendre les inondations et les adaptations intégrées et innovantes, en plus d’informer le public et d’inspirer. «Nous voulions donner un récit à la communauté qui corresponde à son vécu et qui pourra inspirer d’autres villes», résume Emmanuel Campeau. Cet outil offre également l’occasion de prendre un pas de recul sur des situations «habituellement abordées dans l’urgence», poursuit-il.

Ainsi, lors de la prochaine inondation (parce que le risque zéro n’existe pas), les résidants de Saint-Raymond seront prêts. La Ville poursuit par ailleurs ses réflexions quant à l’adaptation aux changements climatiques. «Il sera intéressant de suivre les prochains choix d’aménagements qui font de Saint-Raymond un exemple de ville résiliente», croit Isabelle Thomas, qui s’est engagée à continuer la collaboration avec ses partenaires. 

La recette Saint-Raymond pour contrer les inondations
En lecture:

La recette Saint-Raymond pour contrer les inondations