Le cil primaire: une percée dans la recherche sur le syndrome de Rett

Par UdeMNouvelles
En 5 secondes Une étude montre que le syndrome de Rett survient dès le stade embryonnaire, ce qui offre de nouvelles pistes pour corriger ses effets neurologiques.
Margaux Brin, Anthony Flamier et Marion Guillon

Maladie neurodégénérative rare touchant quasi exclusivement les filles, le syndrome de Rett est généralement diagnostiqué entre 6 et 18 mois, lorsque les premiers symptômes apparaissent. Pourtant, des études récentes menées par Anthony Flamier, chercheur au Centre de recherche Azrieli du CHU Sainte-Justine et professeur adjoint au Département de neurosciences de l’Université de Montréal, révèlent que la mutation génétique responsable de 95 % des cas classiques de ce syndrome est présente dès le stade embryonnaire, avant même la formation complète du cerveau.   

Grâce à des «minicerveaux» cultivés en laboratoire, le chercheur et son équipe peuvent observer l’évolution de la maladie dès ses premiers instants. Cette approche permet également de tester des molécules susceptibles d’inverser les atteintes neurodéveloppementales qu’elle entraîne – et les données préliminaires sont très prometteuses.  

 

Former des minicerveaux avec des cellules de peau  

Pour former ces minicerveaux, Anthony Flamier a extrait de fragments de peau prélevés sur huit patientes des cellules nommées fibroblastes, qu’il a reprogrammées en cellules souches. Ces dernières sont ensuite différenciées pour former des amas de neurones appelés plaques corticales, ce qui recrée la morphologie du cerveau humain. «C’est ce qui se rapproche le plus du cerveau humain qu’on peut cultiver en laboratoire», explique-t-il.  

Ces plaques corticales sont par la suite placées dans un appareil muni d’électrodes, acquis grâce au soutien de la Fondation CHU Sainte-Justine, qui permet d’enregistrer l’activité électrique des neurones.  

«Le signal électrique des neurones atteints du syndrome de Rett est très caractéristique: il forme un tracé en dents de scie plutôt qu’en vagues. Nous avons démontré que cela est lié à un défaut du cil primaire, causé par la mutation génétique», précise le chercheur.   

 

Le cil primaire: une antenne longtemps négligée  

Il y a quelques années, Anthony Flamier a mis au jour le gène dont la mutation est directement à l’origine de nombreux symptômes du syndrome de Rett. Cette mutation affecte le cil primaire des neurones, une minuscule organelle longtemps considérée comme inutile. «Le cil primaire agit comme une miniantenne sur chaque neurone, captant les signaux extérieurs, dit-il. Même une mutation légère peut provoquer des symptômes très graves.»   

La bonne nouvelle? Certaines molécules déjà approuvées aux États-Unis – et utilisées en toute sécurité chez des patients pour traiter d’autres affections – sont en mesure de stabiliser le cil primaire. Avec les doctorantes Margaux Brin et Marion Guillon, le chercheur et son équipe évaluent actuellement l’effet de près de 70 de ces molécules sur l’activité électrique des neurones dans les minicerveaux. Les premiers résultats sont encourageants: déjà 7 d’entre elles permettent de restaurer la structure du cil et de normaliser les signaux neuronaux et 4 s’avèrent particulièrement efficaces.  

«La prochaine étape consistera à tester ces molécules à plus grande échelle en établissant des collaborations internationales, mentionne Anthony Flamier. L’objectif est de déterminer si elles peuvent atténuer les symptômes chez l’ensemble des patients ou seulement certains sous-groupes.»  

Un financement du programme Futurs leaders canadiens de la recherche sur le cerveau 2025 de la Fondation Brain Canada permettra au chercheur et à son équipe de poursuivre ces travaux novateurs et porteurs d’espoir pour toutes les familles touchées par le syndrome de Rett.  

 

Des cerveaux donnés à la science pour aller plus loin  

Et qu’en est-il de l’ensemble du cerveau? Dans les prochains mois, le laboratoire d’Anthony Flamier recevra, grâce à une biobanque américaine, des échantillons de cerveaux d’individus décédés du syndrome de Rett. L’objectif: établir si le défaut du cil primaire est spécifique à certains types de neurones ou s’il est généralisé à l’ensemble du cerveau.

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