L'alimentation pour traiter les maladies inflammatoires de l'intestin chez les enfants?

Par UdeMNouvelles
En 5 secondes Utiliser l’alimentation comme traitement de la colite ulcéreuse ou de la maladie de Crohn chez les enfants serait-il possible? Les recherches de la Dre Jessica Breton pointent en ce sens.
Selon la Dre Breton, une alimentation saine est encore plus cruciale pour les personnes vivant avec une colite ulcéreuse ou la maladie de Crohn.

À l’occasion du Mois de sensibilisation aux maladies inflammatoires de l’intestin, pleins feux sur les travaux de la Dre Jessica Breton, gastroentérologue pédiatrique au CHU Sainte-Justine et professeure au Département de pédiatrie de l’Université de Montréal. Ses recherches sur le lien entre alimentation, microbiome intestinal et inflammation pourraient transformer la prise en charge des jeunes atteints de colite ulcéreuse ou de la maladie de Crohn. 

Alors que les traitements actuels ciblent principalement le système immunitaire, elle explore une voie complémentaire et prometteuse: et si l’alimentation devenait une composante essentielle du traitement des maladies inflammatoires de l’intestin?

 

L’influence de l’alimentation sur le microbiome 

Dans une étude publiée l’hiver dernier, la Dre Breton a démontré qu’une alimentation pro-inflammatoire modifie le microbiome intestinal, mais uniquement chez les enfants atteints d’une maladie inflammatoire de l’intestin. Une alimentation riche en viande rouge et en aliments ultratransformés et pauvre en fibres, vitamines et minéraux était associée à une diminution de la diversité bactérienne et à une augmentation du nombre et de la virulence des bactéries E. coli, connues pour leurs effets nocifs sur l’intestin dans les cas de maladie de Crohn.  

À l’inverse, les jeunes qui privilégiaient une alimentation de type méditerranéen – centrée sur les fruits, les légumes et les aliments peu transformés – avaient un microbiome plus riche et qui offrait moins de prise à E. coli.   

«Le microbiome est généralement stable et résilient, mais chez les personnes atteintes d’une maladie inflammatoire de l’intestin, il devient vulnérable face aux facteurs environnementaux, mentionne la Dre Breton. C’est pourquoi une alimentation saine, même si tout le monde en bénéficie, est encore plus cruciale pour les personnes vivant avec une colite ulcéreuse ou la maladie de Crohn.»

L'inuline, une fibre aux effets anti-inflammatoires prometteurs

Outre une transformation complète de l’alimentation, est-il possible d’introduire des nutriments ciblés ayant un effet bénéfique sur le microbiote? C’est la question que s’est posée la Dre Breton en étudiant l’inuline, une fibre prébiotique naturellement présente dans certains végétaux. 

«J’ai axé mon analyse sur les fibres alimentaires, car elles nourrissent les bactéries intestinales capables de les métaboliser et agissent comme un véritable fertilisant pour le microbiote», précise-t-elle.  

Pour évaluer les effets de l’inuline sur le microbiote, la clinicienne-chercheuse a mené la première étude randomisée pédiatrique sur le sujet, dans laquelle des enfants atteints d’une maladie inflammatoire de l’intestin ont consommé de l’inuline quotidiennement pendant huit semaines en association avec leur traitement habituel.  

Les analyses métagénomiques et métabolomiques des échantillons de selles ont révélé une plus grande diversité bactérienne chez les enfants ayant pris de l’inuline, notamment une augmentation des bactéries productrices de butyrate – une molécule reconnue pour ses propriétés anti-inflammatoires et son rôle protecteur sur la muqueuse intestinale.  

Toutefois, ces effets ne se maintenaient pas après l’arrêt de la consommation, ce qui souligne l’importance d’une prise continue à long terme pour en tirer des bienfaits durables. Une deuxième phase du projet est en cours dont l’objectif est de mettre au jour des marqueurs biologiques permettant de prédire quels enfants répondront favorablement à ce type de traitement. À terme, cette démarche vise à adapter les interventions au profil unique de chaque patient afin de privilégier les approches thérapeutiques les plus efficaces.

 

Une vision thérapeutique alliant médication et alimentation 

En définitive, les recherches de la Dre Breton ouvrent la voie à des prises en charge thérapeutiques plus ciblées et plus efficaces pour les enfants atteints d’une maladie inflammatoire de l’intestin. Plutôt que de se limiter aux traitements classiques centrés sur le système immunitaire, elle propose une stratégie combinée intégrant aussi la modulation du microbiote.  

Grâce à une approche personnalisée et intégrative, ses travaux s’inscrivent dans une perspective de médecine de précision, qui vise à adapter les soins en fonction du profil de chaque patient pour améliorer durablement la qualité de vie des enfants touchés par une maladie inflammatoire de l’intestin.

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