Mettre en scène l’opéra aujourd’hui

Mario Martone, Laurence McFalls, Mariella Pandolfi, Christiane Lutz et François Girard

Mario Martone, Laurence McFalls, Mariella Pandolfi, Christiane Lutz et François Girard

Crédit : Vito Lorusso

En 5 secondes

Un atelier sur la mise en scène contemporaine de l’opéra regroupant de prestigieux metteurs en scène de divers pays a été organisé par une ethnologue et un politologue de l’UdeM.

Le 23 novembre dernier, Mariella Pandolfi, professeure émérite du Département d’anthropologie de l’Université de Montréal, et Laurence McFalls, professeur titulaire au Département de science politique de l’UdeM, ont organisé, dans le cadre de leur groupe de recherche Politique et musique et des activités du Centre canadien d’études allemandes et européennes, un atelier grand public sur la mise en scène contemporaine de l’opéra au Teatro di San Carlo, à Naples. 

Première collaboration entre l’Université et le Teatro di San Carlo, l’atelier a regroupé six grands metteurs et metteuses en scène venus de différents pays sur le thème «Création et controverse: re-mettre en scène l’opéra dans et pour le présent». Ils ont travaillé avec le surintendant et directeur artistique du théâtre, Stéphane Lissner, auteur du livre Pourquoi l’opéra aujourd’hui?, ainsi qu’avec les professeurs McFalls et Pandolfi.

Lier violence, politique et musique

Pendant plusieurs années, Mariella Pandolfi et Laurence McFalls ont travaillé ensemble sur des problématiques relatives à la violence contemporaine. Ils ont ensuite lié violence, politique et musique et créé un séminaire sur ces thèmes qui a été présenté pendant presque sept ans. Percevant la musique et le politique comme des lieux de tension et de rencontre, ils ont invité chanteurs, chefs d’orchestre, musicologues et mélomanes à s’exprimer sur ces sujets.

«Nous ne sommes pas musicologues et nous ne souhaitons pas jouer dans les platebandes des autres. Nous avons voulu souligner le lien entre des créations musicales et d’autres formes d’actions sociales. Dans une perspective interdisciplinaire, nous avons souhaité montrer comment la musique pouvait être porteuse de significations multiples», affirme Laurence McFalls.

«C’est également un phénomène anthropologique, car la musique est coconstitutive de la manière d’être dans son corps et de comprendre le monde», ajoute Mariella Pandolfi.

Ces interventions ont débouché sur la parution d’un livre qu’ils ont dirigé, Création, dissonance, violence: la musique et le politique.

Réunir de grands metteurs en scène de divers pays

À la suite de la parution de cet ouvrage, ils ont réuni six grands metteurs et metteuses en scène d’Espagne, du Canada, d’Italie et d’Allemagne qui ne s’étaient jamais rencontrés auparavant: Calixto Bieito, François Girard, Claus Guth, Christiane Lutz, Mario Martone et Damiano Michieletto.

À l’origine, Mariella Pandolfi et Laurence McFalls avaient songé à organiser cette activité en deux parties à Montréal et à Naples en 2020. En raison des mesures sanitaires en vigueur durant la pandémie, elle a été reportée et restreinte à une seule journée. À l’automne 2021, les artistes ont pu se retrouver au Teatro di San Carlo et échanger durant plus de cinq heures.

«C’est magnifique que le projet d’une anthropologue et d’un politologue ait pu voyager et atterrir à des milliers de kilomètres. Ç’aura été l’Université de Montréal en dialogue avec le monde. Et ce, par le biais d’un théâtre qui, à partir de 1737, a été un protagoniste de la vie musicale européenne», dit Mariella Pandolfi.

L’opéra, un art universel

Même si un opéra est ancré dans une époque donnée, il est tout à fait possible de le représenter à une autre époque. Telle est l’une des conclusions majeures qui sont ressorties des différents échanges entre les intervenants. Ainsi, l’Otello de Verdi se déroule au 15e siècle à Chypre et Venise. Le metteur en scène Mario Martone a fait le choix de le transposer dans une zone inhabitée hors du temps qui pourrait aussi bien se situer en Libye qu’en Irak ou encore en Afghanistan. Il tient à montrer avant tout Otello comme une personne traumatisée par son expérience sur les champs de bataille. «On va détruire l’historique dans lequel un opéra a été imaginé pour faire émerger des thèmes universels», mentionne Laurence McFalls.

Les différents échanges entre les metteurs en scène ont été enregistrés. Après le montage, un film en découlera qui sera diffusé sur la plateforme numérique du Teatro di San Carlo. «Cette belle synergie entre un monde d’artistes et un monde d’universitaires pourra ainsi être revisitée», conclut Mariella Pandolfi.

  • Tous les participants réunis lors de l’atelier.

    Tous les participants réunis lors de l’atelier

    Crédit : Vito Lorusso

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