Changements à la Loi sur le droit d’auteur: six questions pour mieux comprendre

Bibliothèque de droit de l’Université de Montréal

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Crédit : Christian Fleury

En 5 secondes

La durée du droit d’auteur au Canada a changé. Quelles en sont les conséquences pour le milieu universitaire? Entrevue avec Marjorie Gauchier, bibliothécaire spécialisée en droit d’auteur.

La Loi sur le droit d’auteur a été modifiée le 30 décembre 2022: la durée générale de la protection conférée par le droit d’auteur au Canada est passée de 50 à 70 ans après le décès de l’auteur. Pourquoi ce changement?

Le Canada a décidé d’étendre cette durée pour respecter une clause de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique, qui remplace officiellement l’Accord de libre-échange nord-américain depuis son entrée en vigueur en juillet 2020, et ainsi s’aligner sur les États-Unis, mais aussi le Royaume-Uni ou encore l’Australie.

Quelle est la conséquence principale de ce changement?

L’une des conséquences principales est qu’aucune œuvre n’est entrée dans le domaine public au Canada cette année, au 1er janvier 2023. Et aucune œuvre dont la durée de droit d’auteur est dite «générale» n’entrera dans le domaine public canadien pendant les 20 prochaines années.

Les seules exceptions sont les œuvres protégées par le droit d’auteur de la Couronne publiées en 1972 et certaines œuvres cinématographiques non publiées créées en 1952. Les deux catégories sont maintenant dans le domaine public.

Cette modification est-elle rétroactive? Est-ce que des œuvres vont sortir du domaine public?

Non, il n’y a aucun changement pour les œuvres qui sont déjà dans le domaine public. La modification touche les œuvres qui sont encore protégées par le droit d’auteur après le 1er janvier 2022.

Est-ce que cette modification concerne les œuvres publiées sous licence Creative Commons Zero?

Non, les auteurs ont toujours le droit de renoncer à leurs droits moraux et patrimoniaux n’importe quand, et l’utilisation de la licence Creative Commons Zero est l’une de ces options: elle correspond à la mention «Aucun droit réservé» et permet à l’auteur de mettre son œuvre directement dans le domaine public.

La modification touche-t-elle toutes les œuvres protégées par le droit d’auteur?

Le passage de 50 à 70 ans après le décès de l’auteur touche les œuvres qui avaient une durée de protection dite générale ainsi que les œuvres de collaboration.

D’autres types d’œuvres ont également une durée de protection prolongée: les œuvres anonymes, orphelines, cinématographiques ou les enregistrements sonores.

Par contre, les œuvres protégées par le droit d’auteur de la Couronne ne sont pas touchées par cette modification. La durée de leur protection reste de 50 ans après leur publication.

Quelles sont les conséquences de ce changement en contexte de recherche?

Le contexte de recherche fait partie d’une exception à la Loi sur le droit d’auteur: cela signifie que la Loi permet d’utiliser, de reproduire, de photocopier, de modifier des œuvres protégées par le droit d’auteur tant que cela reste dans le cadre de la recherche et n’en sort pas. Cette exception prend fin lorsque les résultats de la recherche doivent être publiés: en effet, le contexte de diffusion nécessite d’obtenir les autorisations des titulaires des droits d’auteur pour tout matériel protégé qu'on souhaite reproduire et diffuser, par exemple la publication d’un article dans une revue commerciale ou le dépôt d’une thèse dans Papyrus.

Cela ne s’applique pas aux œuvres tombées dans le domaine public, puisqu’elles ne sont plus protégées par le droit d’auteur, qu’il s’agisse des droits moraux, qui correspondent aux droits de paternité et d’intégrité de l’œuvre, ou des droits patrimoniaux, soit les droits économiques de l’œuvre telles la reproduction, la traduction, l’adaptation, la diffusion, etc.

Et en contexte d’enseignement?

Pour reproduire dans un cours en présentiel ou en ligne une œuvre ou un fragment d’œuvre protégée par le droit d’auteur – on peut penser à un recueil de textes en version papier ou à des lectures obligatoires à donner aux étudiants et étudiantes dans StudiUM –, le personnel enseignant doit faire une déclaration de reproduction dans l’outil Savia pour respecter la licence Copibec – le service de soutien au droit d’auteur des bibliothèques offre d’ailleurs de l’aide et un accompagnement pour cela [faire ses déclarations: quoi, quand, comment?].

Pour les reproductions d’œuvres tombées dans le domaine public, il n’y a pas d’autorisation à demander à l’auteur, de déclaration de reproduction à faire ou de redevances à payer.

Marjorie Gauchier est bibliothécaire responsable du soutien au droit d’auteur aux bibliothèques de l’UdeM. Vous pouvez trouver de l’information sur le droit d’auteur sur le site des bibliothèques ou la contacter par courriel à droit-auteur(at)bib.umontreal.ca.

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