Un grand portrait de la diversité à l’UdeM

  • Forum
  • Le 20 mai 2020

  • François Guérard
Marie Mc Andrew

Marie Mc Andrew

Crédit : Amélie Philibert

En 5 secondes

Marie Mc Andrew présente les grandes lignes d'un nouveau document de référence en matière d'équité, de diversité et d'inclusion à l’UdeM ainsi que les défis que l'Université doit relever.

Genre, orientation sexuelle, condition sociale, situation de handicap, origine ethnique, appartenance à un groupe racisé ou aux Premiers Peuples: le document Équité, diversité et inclusion à l’Université de Montréal: diagnostic est une véritable mine d’informations sur la composition de la communauté universitaire et brosse un panorama des défis que l’Université doit relever pour pouvoir agir en la matière. Confinement oblige, il a été dévoilé en avril au cours d’une conférence virtuelle. Son auteure, la professeure émérite et conseillère spéciale du recteur en matière d’équité, de diversité et d’inclusion Marie Mc Andrew, en présente les grandes lignes.

Vous avez produit un diagnostic complet sur la question de l’équité, de la diversité et de l’inclusion à l’UdeM qui fait 63 pages. Comment ce travail s’inscrit-il dans la démarche de l’Université?

Depuis 30 ans, de nombreux projets ont été mis sur pied à l’Université en matière d’équité, de diversité et d’inclusion, mais il restait une vision commune à proposer au sein de l’établissement. À la demande du recteur Guy Breton, nous avons engagé une réflexion sur ces enjeux dans le but de mieux coordonner nos actions et même de les intensifier. Au printemps 2019, nous avons diffusé auprès de la communauté universitaire un énoncé de vision faisant part des engagements et principes qui seront suivis par l’Université dans les années à venir. Afin de mieux comprendre les enjeux touchant notre communauté universitaire, nous avons ensuite entrepris une tournée de consultation sur les campus, organisé des groupes de discussion avec des étudiants et des employés, analysé nos données institutionnelles et mené ou recensé plusieurs études. Le résultat de tout ce travail se trouve dans le diagnostic que nous venons de publier.

Et quand passerons-nous de l’état de situation au plan d’action?

Il y a quelques jours, nous avons présenté à l’Assemblée universitaire deux plans d’action, Pour l’équité et l’inclusion et Place aux Premiers Peuples, qui comprennent plus d’une centaine de mesures sur trois ans. Ces deux plans seront lancés officiellement cet automne.

Qu’apprend-on sur la communauté de l’Université de Montréal?

Commençons par nos étudiants et étudiantes. Nous avons pu confirmer que les femmes sont majoritaires partout, sauf à la Faculté de musique et dans le secteur des sciences de la Faculté des arts et des sciences. En outre, près de 23 % de la population étudiante est composée de citoyens canadiens de première génération, ce qui inclut les résidents permanents. Parmi les jeunes de 15 à 24 ans de la région de Montréal, on compte près de 26 % de personnes nées à l’étranger ‒ nous avons donc une légère sous-représentation sur nos campus. Il semble aussi que nous ayons beaucoup moins d’étudiantes et d’étudiants nés de parents immigrants au Canada, ce qui peut représenter un enjeu de recrutement. Aux cycles supérieurs, la diversité est bien présente: les minorités ethniques et visibles comptent pour le quart de l’effectif. Enfin, nous avons des enjeux de représentation importants chez les Autochtones, qu’on trouve en très faible nombre sur nos campus – nous n’en accueillons qu’une cinquantaine.

Vous vous êtes aussi intéressée au corps professoral et aux membres du personnel. Quels sont les faits saillants pour ceux-ci?

Les politiques d’accès à l’égalité en vigueur au cours de la dernière décennie ont eu un effet positif sur la diversité au sein du personnel, mais je dois admettre que nous manquons de données sur plusieurs marqueurs de diversité en raison du faible taux de réponse à notre questionnaire d’auto-identification. Nous savons toutefois que les femmes sont surreprésentées parmi les chargés de cours ainsi que les professionnels et le personnel de soutien: elles constituent respectivement 54 % et 60 % de ces salariés; et elles sont sous-représentées dans le corps professoral, formant 39 % de cette main-d’œuvre. La parité est toutefois atteinte chez les professeurs adjoints, ce qui laisse présager un effet paritaire au sein du corps professoral dans les années à venir.

Cet examen de la communauté universitaire vous a-t-il révélé des surprises?

Nous avons été agréablement surpris par le taux de réussite de nos étudiants et étudiantes autochtones au premier cycle, qui est de plus de six points de pourcentage supérieur à la moyenne. Ce n’est pas si surprenant lorsque l’on comprend que les quelques Autochtones qui choisissent d’étudier chez nous sont atypiques: pour la majorité, leurs parents ont fréquenté l’université, ce qui est rare chez les Premières Nations. Nous comptons toutefois augmenter le recrutement des Autochtones dans tous les profils socioéconomiques. Une autre surprise est la forte présence des hommes à la Faculté de musique, où ils forment 63 % de l’effectif étudiant. Qu’est-ce qui explique ce fait? Nous cherchons à le comprendre.

Quelles pistes d’action préconisez-vous pour répondre aux enjeux soulevés par le diagnostic?

Il y aura un effort de sensibilisation à faire pour que l’équité, la diversité et l’inclusion deviennent un réflexe dans tous les services et activités de l’Université. Nous avons constaté que nos services aux étudiants sont en général appréciés des personnes issues de la diversité, mais il faut admettre que nous devons faire plus d’efforts pour accommoder les étudiants parents, les étudiants qui appartiennent à des minorités sexuelles et, surtout, les étudiants en situation de handicap, qui, dans l’ensemble de nos groupes, vivent les situations les plus problématiques. Il est essentiel de bien former les professeurs, les chargés de cours et les superviseurs de stage à la diversité, puisque c’est avec eux que nos étudiants et étudiantes établissent les contacts les plus significatifs.

Et que proposez-vous pour attirer sur nos campus plus de personnes issues de la diversité?

Nous devons d’abord ajuster nos processus de recrutement des étudiants et des professeurs. En d’autres mots, il nous faut redéfinir ce qu’est l’excellence. Une cote R élevée ou des publications dans des revues prestigieuses, c’est important, mais peut-on équilibrer cela avec d’autres expériences de vie? Pour le recrutement des membres des Premières Nations, l’un de nos grands défis, il nous faudrait carrément mettre en place un «pipeline» vers les autres ordres d’enseignement, le but étant de les encourager à poursuivre des études universitaires dès l’école secondaire. Parmi nos autres pistes d’action, qui sont nombreuses, nous aimerions travailler de plus près avec différents groupes: nos partenaires communautaires, mais aussi nos diplômés, qui pourraient par exemple effectuer du mentorat, et nos donateurs. Des projets comme les Bourses d’accessibilité Rovinescu pour les étudiants issus de l’immigration, nous voulons en voir plus!

Pourquoi les notions d’équité, de diversité et d’inclusion sont-elles si importantes pour l’Université de Montréal?

En tant qu’université, nous avons le devoir d’être représentatifs de la société qui nous entoure. D’autant plus que la diversité est une richesse qui rehausse la qualité de nos milieux de vie et de nos missions d’enseignement et de recherche. Comme nous l’avons inscrit en mai 2019 dans notre énoncé de vision, l’Université se reconnaît aussi la responsabilité de contribuer à corriger les effets des inégalités passées et présentes dans la société et sur nos campus. Nous avons donc un rôle actif à jouer pour accélérer les changements sociaux et faire en sorte que chacun des membres de notre communauté se reconnaisse dans son université et développe le désir de contribuer à son évolution.

Une vitrine de l’équité, de la diversité et de l’inclusion à l’UdeM

À la fin du mois d’avril, l’Université a mis en ligne le site Équité, diversité et inclusion, qui permet de suivre l’évolution de la démarche entreprise depuis près de deux ans. On peut y consulter le Diagnostic, établi par la professeure Marie Mc Andrew et son équipe.