Quel avenir pour le travail policier?

Benoît Dupont

Benoît Dupont

Crédit : Amélie Philibert

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Un groupe de chercheurs en criminologie de l’UdeM a brossé un tableau du travail policier dans un contexte de profondes transformations technologiques et sociales.

«La police de l’ère industrielle doit se transformer pour s’adapter à l’ère numérique.»

Voilà comment Benoît Dupont, professeur et chercheur à l’École de criminologie de l’Université de Montréal, résume l’ouvrage intitulé L’avenir du travail policier, fruit d’une collaboration entre lui et quatre collègues de l’UdeM – Rémi Boivin, Francis Fortin, Samuel Tanner et Anthony Amicelle.

Publié aux Presses de l’Université de Montréal, ce livre fait état des changements profonds qui bouleversent les organisations policières dans un contexte rythmé par l’omniprésence de la téléphonie mobile, la mondialisation des échanges, la croissance des objets connectés, l’automatisation des industries et l’augmentation exponentielle de la cybercriminalité.

Pour Benoît Dupont, le constat général de cette analyse exhaustive est le suivant: «Les organisations policières semblent avoir de la difficulté à formuler des plans d’adaptation aux transformations numériques et à les mettre en œuvre à la vitesse requise par la vélocité de cette évolution.»

Un retard non sans danger

Selon le chercheur, qui est également titulaire de la Chaire de recherche du Canada en cybersécurité, cette difficulté à s’adapter assez rapidement aux changements technologiques soulève plusieurs enjeux.

«La conséquence majeure de ce retard est une diminution de la confiance de la population à l’égard du travail policier. Une police déconnectée des transformations sociétales devient moins légitime aux yeux de la population, puisqu’elle semble moins efficace pour régler certains problèmes de délinquance, de cybercriminalité notamment. Les citoyens peuvent alors remettre en doute sa capacité à les protéger adéquatement.»

Le professeur rappelle d’ailleurs que, dans une société démocratique, c’est la légitimité de la police qui lui permet de faire son travail, car elle incarne le bien commun.

Benoît Dupont ajoute que, lorsque cette confiance s’effrite, les entreprises font davantage appel à des services privés pour régler des problèmes individuels de cybercriminalité. Ou encore les individus s’improvisent justiciers en ligne. «Des perspectives qui n’aident pas l’ensemble de la société, mais qui fragmentent plutôt la réponse de la police et complexifient la coordination d’actions globales.»

Un tableau encourageant malgré tout

L’ouvrage des professeurs de l’UdeM offre à la fois un bilan des bonnes et moins bonnes pratiques des organisations policières et des pistes de solution pour l’avenir. Aux yeux de Benoît Dupont, la police doit se réinventer en accroissant les formations de ses membres et en priorisant le travail collaboratif de façon qu’elle devienne «coordonnatrice d’un vaste réseau d’acteurs publics et privés».

Et le chercheur croit que cette évolution est à la portée des organisations policières. «La police ne s’adapte peut-être pas assez rapidement, mais elle a la capacité de le faire. Je suis loin de dire que la police est inefficace et en rupture complète avec la société. Elle conserve une capacité d’action et possède des ressources qui sont loin d’être négligeables.»

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