Maladie transmise par les tiques: anaplasmose, d’où viens-tu?

Une tique femelle

Une tique femelle

Crédit : Catherine Bouchard

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Une équipe de recherche dont fait partie la Faculté de médecine vétérinaire de l’UdeM étudie les sources d’une maladie émergente transmise par les tiques, l’anaplasmose.

Les résidants de l’Estrie connaissent depuis plusieurs années la maladie de Lyme. Mais voilà qu’ils doivent maintenant se protéger d’une autre maladie transmise par les tiques à pattes noires: l’anaplasmose.

L’été dernier, 35 cas de cette affection dont les symptômes s’apparentent à ceux de la grippe ont été déclarés en Estrie, soit le nombre le plus élevé de cas répertoriés dans un même endroit au Canada.

Et cette maladie pourrait devenir de plus en plus courante au Québec, notamment en raison des changements climatiques, qui prolongent la période d’activité des tiques, accélèrent leur cycle de vie et allongent la durée des contacts possibles entre elles et les humains.

Cette tendance à la hausse intéresse particulièrement une équipe de recherche de la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal, composée des professeurs Catherine Bouchard, Cécile Aenishaenslin, Patrick Leighton et Jean-Philippe Rocheleau, et de l’étudiante de maîtrise en épidémiologie à l’UdeM Raphaëlle Audet-Legault.

Ensemble, les vétérinaires mènent cet été un projet de recherche qui vise à mieux comprendre quelles espèces de petits mammifères sauvages sont des réservoirs pour l’anaplasmose, donc lesquelles contribuent à la transmission de la maladie chez l’humain.

«Il faut voir la tique comme une seringue souillée, explique la Dre Catherine Bouchard. Dans un repas précédent, la tique a piqué une souris et, pour l’exemple, disons que la bactérie responsable de l’anaplasmose circule dans le sang de la souris. Ensuite, lorsque la tique pique l’humain, elle contamine l’humain avec le sang de la souris infectée. L’humain sera contaminé si bien sûr la souris était porteuse d’un variant zoonotique.»

Mieux comprendre la répartition

Tout l’été, en collaboration avec la Ville de Bromont, la Direction de santé publique du CIUSSS de l’Estrie ‒ CHUS et la MRC Brome-Missisquoi, l’équipe capturera des rongeurs de taille variée (souris, tamias, écureuils) autour de la municipalité de Bromont pour évaluer les espèces chez qui l’anaplasmose circule davantage. Les vétérinaires récolteront également des tiques sur le terrain de façon générale pour connaître la proportion de celles infectées dans la région.

La moitié des zones d’échantillonnage se trouve dans les régions où il y a eu des cas humains de la maladie et l’autre moitié où il n’y en a eu aucun. «Le but est de pouvoir comparer la proportion de petits mammifères infectés proches des cas rapportés chez les humains avec celle plus loin, en plus de vérifier si la prévalence de l’infection varie selon les différentes espèces», précise la Dre Raphaëlle Audet-Legault.

«Nous avons hâte de voir à quel point la circulation est circonscrite ou non, ajoute la Dre Bouchard. Je ne serais pas étonnée qu’il n’y ait pas de différence entre les zones près des cas humains et celles éloignées, et qu’on se rende compte que les cas humains sont plus nombreux là où il y a une plus forte densité résidentielle, mais que la maladie circule tout autant ailleurs. Il y aurait donc un enjeu de vigilance pour les résidants.»

Sensibiliser pour prévenir

Comme le mentionne la Dre Bouchard, l’explosion des cas humains d’anaplasmose invite à augmenter les efforts de promotion des comportements préventifs auprès des populations exposées – comme le port de vêtements longs et une routine d’inspection après chaque sortie.

Cette conscientisation concerne non seulement les résidants, mais aussi les professionnels de la santé, qui doivent aller au-delà de la maladie de Lyme lors du diagnostic chez des patients venant d’une région à risque.

Cette tâche n’est pas si aisée, sachant que les symptômes de l’anaplasmose sont principalement non spécifiques et bénins comme de la fièvre, des frissons, des maux de tête et des douleurs musculaires. Et contrairement à la maladie de Lyme, l’anaplasmose ne provoque pas de rougeur cutanée.

Raphaëlle Audet-Legault rappelle également que la majorité des personnes infectées ont été piquées près de leur maison, lors de l’entretien de leur cour par exemple. «En Estrie, les résidants ont des terrains à flanc de montagne, sous un couvert d’arbres matures. Ils sont donc littéralement dans l’habitat des tiques. Et c’est pourquoi il faut accroître nos efforts de sensibilisation, puisque tous les habitants sont potentiellement à risque.»

À ce chapitre, l’équipe de recherche est déjà allée à la rencontre des Bromontois afin de leur présenter leur projet de recherche. Des ateliers interactifs sont aussi prévus tout au long de l’été.

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