Yan Kestens au cœur d’une étude pancanadienne sur le transport actif et équitable

Crédit : Getty

En 5 secondes

Le professeur Yan Kestens est l’un des chercheurs principaux de l’équipe CapaCITY/É, qui a reçu une subvention de trois millions de dollars des Instituts de recherche en santé du Canada.

Yan Kestens

Yan Kestens, professeur titulaire au Département de médecine sociale et préventive de l’Université de Montréal

Crédit : Amélie Philibert | Université de Montréal

Yan Kestens, professeur titulaire au Département de médecine sociale et préventive de l’Université de Montréal, a appris en décembre dernier que le projet CapaCITY/É, auquel il participe, avait obtenu une subvention de trois millions de dollars des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC). Le projet, mené par les professeurs Meghan Winters, de l’Université Simon Fraser, Daniel Fuller, de l’Université de la Saskatchewan, et Marie-Soleil Cloutier, de l’Institut national de la recherche scientifique, réunit des chercheurs et chercheuses de plusieurs universités canadiennes et d’une université australienne. Son but? Améliorer la santé des populations en zones urbaines par la mise en œuvre d’interventions en matière de transport durable pour favoriser la santé, la mobilité et l’équité dans les villes.

Le professeur Kestens se consacre plus particulièrement à l’influence des environnements sur la santé depuis une quinzaine d’années. «C’est toujours une bonne nouvelle quand on apprend qu’on est financé, d’autant plus que CapaCITY/É s’inscrit en continuité avec des travaux qu’on a menés par le passé. En fait, CapaCITY/É, ce sont plusieurs équipes qui se sont regroupées pour travailler ensemble. Par exemple, une partie de l’équipe d’INTERACT, un projet que j’ai monté en 2016-2017, a été intégrée à CapaCITY/É avec d’autres collaborateurs», précise celui qui possède un doctorat en aménagement du territoire de l’Université Laval et qui a fait un postdoctorat en épidémiologie spatiale à l’UdeM.

Des intérêts convergents

L’intérêt de Yan Kestens pour la mobilité active, l’exposition aux risques, l’accessibilité aux ressources, le rôle des environnements alimentaires, le vieillissement et la santé mentale s’est développé au fil de son parcours de formation. «C’est vrai que mes champs d’intérêt sont variés et peuvent paraître disparates. J’ai fait une première maîtrise en climatologie et je me suis ensuite intéressé à la géographie humaine à l’Université Laval, dans mes travaux sur les liens entre le développement des cultures caféières au Vietnam, la déforestation et ses effets sur les ressources hydrologiques. J’ai enchaîné avec un doctorat, toujours à l’Université Laval, en aménagement du territoire, consacré aux liens entre l’environnement bâti et la végétation dans les quartiers. Cette thèse m’a mené vers des dimensions plus statistiques et économétriques et donné le goût de creuser cette voie pour mieux comprendre les influences des environnements sur la santé», explique le professeur.

En 2004, il entreprend un postdoctorat au Centre de recherche du CHUM sur ce qu’on appelle l’épidémiologie sociale ou spatiale, c’est-à-dire les liens entre l’environnement et la santé. «Le fil conducteur, c’est la volonté de comprendre comment l’humain façonne son environnement, mais aussi comment l’environnement façonné agit sur les populations, sur les sociétés humaines, le tout sous l’angle de la santé surtout depuis 15 ans», indique-t-il.

Yan Kestens travaille à l’UdeM depuis 2006. Il a été professeur associé, professeur adjoint et professeur agrégé, de même que titulaire d’une chaire en santé publique appliquée à l’École de santé publique de l’UdeM (ESPUM) de 2014 à 2019, avant d’y être intégré comme professeur titulaire en 2019-2020. Parallèlement, il a été chercheur à la Direction de santé publique de Montréal de 2006 à 2010. À cela s’ajoutent son rôle de chercheur au Centre de recherche en santé publique depuis 2021 et celui de chercheur principal au projet Étude COHESION avec Grégory Moullec, professeur associé à l’ESPUM. «Il s’agit d’une vaste étude pancanadienne où l’on effectue des enquêtes tous les trois mois. Les données qu’on collecte portent sur des enjeux de santé mentale, mais on s’intéresse également au milieu de vie et à la santé. Tout cela se recoupe, dit-il, revenant aux objectifs du projet CapaCITY/É. On étudie deux types d’interventions en milieu urbain. L’une porte sur l’aménagement de réseaux cyclables pour tous les âges et capacités afin de mieux comprendre et d’élaborer des stratégies visant à renforcer les déplacements actifs dans les villes pour répondre à toutes sortes d’enjeux de développement durable. L’autre intervention concerne la réduction de la vitesse des véhicules automobiles.»

La mise en œuvre des connaissances

En discutant avec Yan Kestens de son profil de formation, on apprend qu’il accorde une grande importance à la manière d’étudier les choses. «Je dirais que ce que j’apporte, c’est un intérêt, une expertise sur les méthodes, la manière dont on regarde les choses, les analyse, collecte des données et la façon de les mettre en rapport.»

C’est ce savoir qu’il transmet à ses classes des programmes de 2e et de 3e cycle de l’ESPUM. «J’avoue que mon expérience en recherche dans différentes disciplines nourrit mon enseignement», affirme-t-il. Plus concrètement, il donne des séminaires sur les méthodes de la recherche à la maîtrise, option Recherche, dont il est responsable, et un séminaire sur les méthodes de recherche au doctorat.

Au-delà de la recherche, il y a l’application des résultats sur le terrain. Par exemple, une partie de la subvention des IRSC au projet CapaCITY/É permettra aux chercheurs et chercheuses de se pencher sur la mise en œuvre des interventions. Avec son équipe, Yan Kestens supervisera la conception d’un outil en ligne pour donner de manière très concrète des clés, des méthodes et des outils aux partenaires des milieux étudiés, entre autres les villes.

Depuis quelques années, il est souvent question de la nécessité de faire plus de place au transport actif. Yan Kestens, qui se décrit comme un éternel optimiste, croit que la prise de conscience collective liée à la crise climatique et à des crises sociales fait que les gens sont prêts à retrousser leurs manches et qu’il y a un énorme potentiel pour changer les choses. «On le voit au Québec sur le plan des transports actif et collectif. Il y a eu un sous-financement chronique au cours des 40 dernières années, donc, pour faire évoluer la situation, on n’aura pas le choix d’investir correctement. C’est là que le type de travaux que nous réalisons peuvent aider à partager la prise de conscience et à converger vers une vision commune, mais aussi à fournir des outils concrets pour être en mesure de dire voici ce qu’on devrait faire ou ce qu’on pourrait faire pour améliorer les choses», conclut-il.