Les cyclistes nés en haute altitude performeraient mieux
- UdeMNouvelles
Le 29 mars 2023
- Béatrice St-Cyr-Leroux
Surreprésentés parmi les cyclistes qui atteignent un niveau professionnel, les individus nés en haute altitude auraient une meilleure consommation d’oxygène, selon une étude colombienne.
On s’en doutait, mais voilà que la science le confirme: les cyclistes nés en haute altitude seraient plus performants.
Tel est le constat d’une étude colombienne à laquelle a pris part Mauricio Garzon, chargé de cours à l’École de kinésiologie et des sciences de l’activité physique de l’Université de Montréal.
Pour parvenir à cette conclusion, l’équipe de recherche a soumis à un test d’effort croissant jusqu’à épuisement – pour déterminer la consommation maximale d’oxygène (VO2 max) et la puissance aérobie maximale (PAM) – 80 coureurs âgés de 17 à 22 ans de trois catégories de performance et nés à trois niveaux d’altitude.
D’abord, alors que les cyclistes nés à une altitude de plus de 2000 m représentaient environ 50 % de l’échantillon analysé, les cyclistes qui avaient remporté ou occupé des positions privilégiées en tant que professionnels à un «grand tour» (Tour de France, Tour d’Italie ou Tour d’Espagne) constituaient une proportion significativement plus élevée (84 %) du groupe étudié.
Ensuite, les coureurs nés à basse altitude avaient des valeurs de PAM et de VO2 max inférieures à celles des cyclistes de moyenne et de haute altitude.
«Chez les cyclistes qui atteignent les podiums dans les grands tours, le facteur fondamental de leur succès est une meilleure consommation d’oxygène et nous avons prouvé que naître, grandir et s’entraîner en haute altitude améliore cette consommation», indique Mauricio Garzon.
Altitude et performance
En altitude, l’oxygène disponible est réduit. Pour compenser, entre autres mécanismes, le corps produit davantage d’hémoglobine et d’hématocrite, des éléments du sang qui facilitent le transport de l’oxygène vers les organes. Ces adaptations hématologiques accroîtraient la performance aérobique dans la mesure où le volume total de globules rouges augmente et favorise la consommation d’oxygène, ce qui est un facteur clé du succès en sport d’endurance.
Beaucoup d’équipes et de fédérations professionnelles partent faire des «stages en altitude» pour améliorer les performances de leurs athlètes. Mais les bienfaits hématologiques de ces séjours d’une durée approximative de trois semaines ne durent qu’un temps dans l’organisme.
«Notre étude montre qu’il semble exister une composante génétique chez ceux qui sont nés en altitude, possiblement encore plus si c’est aussi le cas de leurs parents et de leurs grands-parents, ce qui permet d’avoir naturellement cette adaptation, avance Mauricio Garzon. On peut le constater dans les grands tours: beaucoup de cyclistes d’Équateur, de Colombie ou en général des régions montagneuses comme les Pyrénées, les Alpes, la Sierra Nevada ou les Carpates et même ceux qui s’entraînent en altitude dans certaines régions du Colorado et de l’Arizona parviennent à rester en tête de peloton lors des étapes de montagne, ils répondent mieux aux efforts en haute altitude.»
Naturellement avantagés, mais…
Des athlètes nés en haute altitude seraient donc plus prédisposés à devenir sportifs de haut niveau, particulièrement dans des sports d’endurance (quand le contexte socioéconomique le permet), grâce à une production naturelle de composantes hématologiques favorisant le transport de l’oxygène dans le corps.
Mais il y a un bémol.
Les athlètes professionnels sont soumis à des contrôles antidopages. Et parfois, même s’ils n’ont pas pris de substances dopantes, certains cyclistes dépassent les limites permises.
C’est notamment le cas pour l’érythropoïétine (EPO). Utilisée comme substance dopante, l’EPO est une hormone sécrétée naturellement par les reins pour stimuler la production de globules rouges permettant d’augmenter l’apport en oxygène et la saturation. Et l’hypoxie causée par l’altitude stimule justement la production d’EPO. Il serait donc possible de présenter naturellement un haut taux de cette hormone.
«Dans le monde du sport, on commence à envisager cette hypothèse: que certains athlètes ont une réponse différente en raison de leur environnement ou de leur génétique, et non pas à cause d’une tricherie», précise le chercheur.