L’engagement étudiant, d’une génération à l’autre

Crédit : Bénédicte Brocard

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Ayant occupé le poste de secrétaire général de la FAÉCUM à des époques différentes, Nicolas Girard et Radia Sentissi parlent de leur engagement au sein du mouvement étudiant à l’UdeM.

Nicolas Girard devient secrétaire général de la Fédération des associations étudiantes du campus de l'Université de Montréal (FAÉCUM) au printemps 1994, tandis que se profile une campagne référendaire sur la souveraineté du Québec. Vingt-huit ans plus tard, en 2022, Radia Sentissi est élue au même poste, au sortir d’une pandémie qui a bouleversé le monde entier.

Voilà deux générations de secrétaires généraux qui ont présidé aux destinées de la FAÉCUM et de ses quelque 80 associations membres à des périodes pour le moins marquantes!

Mais d’où vient leur désir de s’engager collectivement et qu’ont-ils en commun, outre le fait d’être tous deux issus de la «filière d’implication» qu’est le Département de science politique de l’UdeM?

Deux parcours marqués par l’histoire

Crédit : Bénédicte Brocard

Chez Nicolas Girard, tant sa famille immédiate que son entourage étaient politisés. Son père a lui-même fait partie du mouvement étudiant et a participé à la création du Parti québécois à la fin des années 1960.

«J’ai été sensibilisé à la politique à un très jeune âge, mais ce qui a constitué le réel déclencheur de mon engagement, c’est une phrase qu’a dite Félix Leclerc à la mort de René Lévesque, le 1er novembre 1987, se remémore-t-il: “La première page de la vraie histoire du Québec vient de se terminer, à ceux qui restent d’écrire la deuxième.” J’avais 15 ans et j’ai dès lors voulu contribuer à ce projet collectif.»

Au début des années 1990, il devient président de l’Association générale étudiante du Cégep Édouard-Montpetit, après quoi il est porté à la tête du Rassemblement des jeunes souverainistes, tandis que s’annonce le référendum sur l’accord de Charlottetown de 1992 – le projet avorté de réforme constitutionnelle proposé par le gouvernement fédéral d’alors.

Une fois au baccalauréat en science politique à l’Université de Montréal, il assume la fonction de secrétaire aux affaires externes de la FAÉCUM en 1993, puis celle de secrétaire général de la Fédération l’année suivante et jusqu’en 1996.

C’est également dans sa jeunesse que Radia Sentissi ressent l’appel de l’engagement, inspirée par sa mère qui est active dans différents organismes communautaires en plus d’effectuer des voyages humanitaires.

«J’ai fréquenté le Collège international Marie de France et, dès le primaire, j’ai participé notamment à l’organisation de la kermesse, relate-t-elle. Au secondaire, j’ai fait du bénévolat dans le cadre d’un programme de l’Institut universitaire de gériatrie de Montréal, où j’agissais auprès des personnes âgées chaque semaine et j’ai beaucoup aimé l’expérience.»

Puis, après avoir été au Collège Jean-de-Brébeuf, où l’association étudiante était peu active à l’époque, Radia Sentissi s’inscrit au baccalauréat en science politique à l’UdeM en 2018. Dès la première année, elle devient représentante de cohorte et prend en charge les communications de l’Association des étudiants en science politique et en études internationales de l'UdeM, dont elle sera ensuite présidente.

En 2020, elle change de programme pour se diriger vers les sciences de la communication. «Comme bien des gens l’ont fait au début de la pandémie, je me suis concentrée sur mes études, mais rapidement, je me suis ennuyée de mes activités d’engagement», confie-t-elle.

En mai 2021, elle se fait élire à titre de coordonnatrice aux affaires associatives de la FAÉCUM et, sentant qu’elle avait encore des choses à y accomplir, elle se présente comme secrétaire générale l’année suivante.

Des enjeux collectifs en évolution

Outre la question des droits de scolarité et du financement des universités qui traverse le temps et continue de préoccuper les dirigeantes et dirigeants étudiants, Nicolas Girard et Radia Sentissi ont relevé différents défis en fonction de l’évolution des intérêts de leurs commettants.

En 1994, sur la scène fédérale, le ministre des Finances, Lloyd Axworthy, fait adopter une réforme des programmes sociaux qui ampute les transferts aux provinces et impose des compressions de 2,6 G$ dans l’ensemble des systèmes d’éducation postsecondaire du pays.

«Le mouvement étudiant québécois avait fait front commun contre cette réforme, se souvient Nicolas Girard. En janvier 1995, une manifestation d’environ 10 000 étudiantes et étudiants avait eu lieu à Montréal. Nous avions ensuite organisé une grande manifestation sur la colline du Parlement, à Ottawa, à laquelle 700 étudiants et étudiantes de l’UdeM avaient pris part.»

La même année, la FAÉCUM contribue à faire adopter la Politique sur les droits des étudiantes et des étudiants de l’Université de Montréal, en plus de présenter un mémoire dans le cadre des États généraux sur l’éducation. L’année suivante, Nicolas Girard est à la tête d’une manifestation contre l’augmentation des frais d’inscription et d’obtention de diplôme à l’UdeM.

Sous la direction de Radia Sentissi, la FAÉCUM a fait des gains importants, notamment en lien avec la santé mentale des étudiantes et des étudiants, qui a été mise à rude épreuve avec la pandémie de COVID-19.

D’une part, en 2021, la Fédération obtient de concert avec l’Union étudiante du Québec que le gouvernement québécois verse 510 M$ aux établissements d'enseignement postsecondaire pour la mise en place de mesures de soutien à la réussite en réponse à la COVID-19. Cela a entre autres permis aux Services à la vie étudiante de l’UdeM d’accroître considérablement leur capacité d’intervention en psychothérapie.

D’autre part, en 2022, la FAÉCUM et une cinquantaine de syndicats étudiants font reculer l’Autorité des marchés financiers (AMF), qui avait projeté de modifier le mode d’adhésion aux régimes d’assurance étudiants.

«Les changements que l’AMF proposait auraient privé plusieurs membres de notre communauté étudiante d’une couverture essentielle en matière de soins de santé, de soins dentaires et psychologiques», indique Radia Sentissi.

L’année précédente, la FAÉCUM avait aussi obtenu une réduction uniforme de 40 % du tarif étudiant pour l’ensemble des titres de transport sur le territoire couvert par l’Autorité régionale de transport métropolitain – une action à laquelle Nicolas Girard est sensible, lui qui est devenu directeur général du Réseau de transport de la Capitale en décembre dernier.

Une expérience qui forge l’avenir

Si l’engagement étudiant fait appel à l’altruisme, il procure en retour une expérience individuelle qui forge l’avenir.

Après avoir obtenu son baccalauréat en science politique et entrepris une maîtrise en relations industrielles, Nicolas Girard a été attaché politique, puis attaché de presse de différents ministres du gouvernement de Lucien Bouchard, de 1998 à 2003. L’année suivante, il est devenu député de la circonscription de Gouin à l’Assemblée nationale, poste qu’il occupera jusqu’en 2012. Depuis 10 ans maintenant, sa carrière est consacrée au transport collectif.

De son côté, Radia Sentissi poursuit son travail avec les neuf autres personnes qui constituent le comité de direction de la FAÉCUM.

Tant pour Nicolas Girard que pour Radia Sentissi, cet engagement étudiant s’est avéré très formateur et les incite à participer à la vie publique.

«Le poste de secrétaire général offre le privilège de diriger une équipe et du personnel à un âge relativement jeune, et permet d’apprendre à créer un consensus avec des associations qui ne partagent pas toujours les mêmes intérêts ou stratégies, souligne Nicolas Girard. C’est un riche apprentissage de la démocratie qui nous incite à bien articuler notre pensée et à bien nous préparer pour les rencontres et assemblées.»

«La FAÉCUM est une bonne école pour apprendre à bien définir nos objectifs et accepter le point de vue de l’autre dans le respect, en lui laissant de la place pour s’exprimer, conclut Radia Sentissi. C’est ce qui fait des associations étudiantes des organisations dynamiques!»

  • Crédit : Bénédicte Brocard

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