Réduire l’empreinte carbone en agroalimentaire grâce à la génomique
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Mois de la nutrition Article 6 / 13
Un laboratoire «vivant» au cœur de Montréal
Dans un premier temps, la recherche se concentrera sur les réalités urbaines, avec un véritable laboratoire vivant à l’échelle de Montréal. Avec sa superficie de près de 500 km2 où l’on trouve une douzaine de microbrasseries, près de 150 boulangeries et bien d’autres producteurs de matières organiques dispersés sur le territoire, la ville était un lieu de prédilection pour ce projet.
L’utilisation d’outils de génomique, donc liés à la structure génétique et à l’ADN, permettra aux scientifiques d’étudier les associations entre les microorganismes qui interagissent lors du processus de biodégradation.
«Nous pourrons tester comment les processus biologiques peuvent être exploités pour améliorer ce que les bactéries, les insectes et les champignons consomment et réduire les émissions de gaz à effet de serre avant, pendant et après la bioréaction. La biodiversité microbiologique qui se trouve là est possiblement d’intérêt pour l’agriculture et le secteur agroalimentaire tout entier», explique Joan Laur.
L’équipe travaillera en étroite collaboration avec de nombreux partenaires de l’économie circulaire, notamment ceux qui opèrent des bioréacteurs inspirés de la nature comme TriCycle, Mycélium Remédium Mycotech et Brome Compost. L’objectif de cette recherche collaborative est de récupérer les résidus de matières organiques à différentes étapes de la chaîne agroalimentaire – une collaboration indispensable pour s’assurer de répondre aux défis actuels du milieu.
Au total, une vingtaine de chercheuses et de chercheurs de quatre universités – Université de Montréal, INRS, Université Western et Université McGill – travailleront sur ce projet multidisciplinaire d’envergure, en collaboration avec près d’une trentaine de partenaires du milieu, soit, en plus du Jardin botanique de Montréal et de l'IRBV, TriCycle, Mycélium Remédium Mycotech, StillGood, Brome Compost, Blanc de Gris, La ligne verte, le Vignoble de la Bauge, la Ville de Montréal, le Cégep de Victoriaville, RECYC-QUÉBEC, Synergie Montréal, la Fondation David Suzuki, Équiterre, la Société pour la nature et les parcs – section Québec, la Table filière des insectes comestibles, Invers, les 3 Brasseurs, la Boulangerie Jarry, l’EtOH Brasserie, la Brasserie Harricana, LOOP Mission, le Collège Ahuntsic et Parafilms.
«Ce maillage entre le milieu de l’entrepreneuriat, des organisations structurantes et la communauté de recherche est un vrai moteur d’innovation. Il nous donnera la possibilité de trouver des solutions concrètes et de contribuer, ensemble, à la lutte contre la crise climatique», affirme Louise Hénault-Éthier.
«Nous nous efforçons de découvrir comment les 30 entreprises et plus de notre réseau peuvent collaborer de la meilleure façon pour optimiser les avantages économiques et écologiques de leurs efforts de recyclage. Nous sommes enthousiastes quant aux connaissances pratiques et théoriques que ce projet apportera au domaine et par son potentiel d’influence positive», ajoute le cochercheur Jury Gualandris, directeur du Centre for Building Sustainable Value et professeur associé en gestion des opérations et durabilité à l'Ivey Business School de l'Université Western.
Un projet de l’Université de Montréal, de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) et de l’Université Western, en Ontario, reçoit un financement de 6 545 700 $ pour réaliser des travaux menant à la réduction des sous-produits agroalimentaires et de leurs émissions de gaz à effet de serre.
En une seule année, l’agriculture, les résidus alimentaires et la gestion de ces résidus produisent à eux trois davantage de CO2 que le transport de passagers au Canada. Devant ce constat, il devient nécessaire d’élaborer de nouvelles approches pour réduire l’empreinte carbone du milieu agroalimentaire au pays.
C’est donc dans un contexte de crise climatique que l’équipe, codirigée par les professeures Joan Laur, de l’Institut de recherche en biologie végétale (IRBV), et Louise Hénault-Éthier, de l’INRS, s’est donné pour objectif de mieux comprendre et d’optimiser le processus de transformation des résidus organiques par les microorganismes. En d’autres mots, comment les sous-produits agroalimentaires ou les restants d’aliments sont-ils biodégradés par les microorganismes, les champignons ou les insectes qui s’en nourrissent?
«On a l’ambition d’optimiser des bioréacteurs à transformation naturelle, comme les champignonnières et les fermes d'insectes, déjà exploités par les agriculteurs urbains. Grâce à ce processus, on transformera les résidus en aliments ou en engrais», lance Joan Laur, cochercheuse du projet.
«Il a été démontré qu’on pouvait réellement réduire l’empreinte carbone du système agroalimentaire en faisant de l’économie circulaire qui s’inspire du fonctionnement naturel des écosystèmes. Nous voulons maintenant optimiser ces applications en utilisant la puissance de la génomique», poursuit Louise Hénault-Éthier, également cochercheuse du projet et directrice du Centre Eau Terre Environnement de l’INRS.
Un financement pancanadien pour soutenir la recherche en génomique
Le financement de 6,5 M$ a été obtenu grâce à l’initiative La génomique et l’action climatique – Production bioalimentaire durable et adaptée au climat, lancée par Génome Canada en mai 2022. Au total, ce sont neuf équipes interdisciplinaires qui ont été sélectionnées à l’échelle nationale pour mener des recherches de pointe en génomique.
L’annonce d'un financement total pancanadien de 70 M$ a été faite aujourd’hui par Greg Fergus, secrétaire parlementaire du premier ministre et de la présidente du Conseil du Trésor, à la Centrale agricole, à Montréal, la plus grande coopérative d’agriculture urbaine du Québec.
«La génomique est le moteur de l'innovation dans de nombreux secteurs économiques stratégiques au Canada, de l'agriculture à l'énergie en passant par la pêche et la foresterie. Le gouvernement du Canada est fier de soutenir ces équipes du Défi interdisciplinaire, qui renforcent la résilience des systèmes de production alimentaire du Canada, créant ainsi des aliments plus sûrs et plus durables pour la population canadienne et celles d’autres pays», a déclaré Greg Fergus.
«Les technologies génomiques ont permis certaines des percées scientifiques les plus impressionnantes des deux dernières décennies et la tendance se poursuit grâce au leadership de nos chercheurs et chercheuses. Notre gouvernement est fier de soutenir les neuf équipes annoncées aujourd'hui, car elles démontrent une fois de plus le rôle de leader mondial du Canada dans ce domaine. Leur expertise nous aidera à réduire l'empreinte carbone des systèmes de production alimentaire du Canada tout en stimulant l'innovation», a dit François-Philippe Champagne, ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie.
À la suite de leurs travaux, les équipes proposeront des innovations biotechnologiques permettant de réduire l'empreinte carbone des systèmes de production bioalimentaire du Canada. En plus des retombées sociales et environnementales majeures promises par les travaux des équipes, on estime que plus de 36 000 emplois seront créés par ces initiatives durables.