Comment la stigmatisation nuit à la santé des personnes trans

L’article souligne que les personnes transgenres et non binaires qui se sentent davantage liées à leur communauté présentent un patron de variabilité du cortisol plus dynamique, ce qui donne à penser que les liens communautaires favorisent une meilleure récupération face au stress.

L’article souligne que les personnes transgenres et non binaires qui se sentent davantage liées à leur communauté présentent un patron de variabilité du cortisol plus dynamique, ce qui donne à penser que les liens communautaires favorisent une meilleure récupération face au stress.

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Des chercheurs ont démontré un lien entre l’exposition des personnes transgenres à la stigmatisation liée à leur genre et la production de cortisol, une hormone clé de la réponse au stress.

Robert-Paul Juster

Robert-Paul Juster

Crédit : Amélie Philibert, Université de Montréal

Une étude canado-américaine sur le contexte sociopolitique et la résilience indique que, chez les personnes transgenres et non binaires, le sentiment de lien envers leur communauté pourrait diminuer les effets néfastes sur la santé de l’exposition chronique à la stigmatisation.

Dirigée par deux chercheurs transgenres, L. Zachary DuBois, de l’Université de l’Oregon, et Jae Puckett, de l’Université d’État du Michigan, en collaboration avec Robert-Paul Juster, professeur au Département de psychiatrie et d’addictologie de l’Université de Montréal et chercheur au Centre de recherche de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal, l’étude sur la résilience et la santé trans vise à comprendre les conséquences des différents contextes sociopolitiques sur la santé et le bien-être des personnes transgenres et non binaires. La dernière publication issue de cette étude porte sur les variations de la production de cortisol par le corps humain, une hormone clé dans la réponse au stress.

Dans des conclusions publiées au début du mois de janvier dans la revue Hormones and Behavior, les chercheurs ont montré un lien entre une exposition plus importante à la stigmatisation liée au genre et un patron de variabilité du cortisol plus lent, aplati et amorti. Cela implique une moindre capacité du corps à réguler la réponse au stress, d’après les chercheurs.

«Presque toutes les cellules et tous les systèmes de notre corps sont influencés par le cortisol, déclare Robert-Paul Juster. C’est pourquoi le stress chronique se manifeste par une panoplie de désordres dans les cellules du cœur, du cerveau, du système digestif, des reins… ainsi que par des disparités dans la cognition et la santé mentale.»

L’article souligne que les personnes transgenres et non binaires qui se sentent davantage liées à leur communauté présentent un patron de variabilité du cortisol plus dynamique, ce qui donne à penser que les liens communautaires favorisent une meilleure récupération face au stress.

Les résultats publiés confirment également les faits rapportés dans d’autres études selon lesquelles les femmes transgenres et les personnes de la diversité de genre à qui le sexe masculin a été attribué à la naissance sont plus stigmatisées que les autres membres de la communauté trans. Pour les chercheurs, cette situation relève des aspects socioculturels du genre et des rôles de genre, et non de la biologie.

Outre l’association directe entre le contexte sociopolitique stigmatisant et la production de cortisol, les chercheurs ont montré dans une étude de 2022 que cette stigmatisation est associée à d’autres marqueurs de stress chronique (appelés «charge allostatique») représentant un risque accru de maladie et de mortalité.

Créer un pont

«Les études communautaires comme celle-ci créent un pont entre ce que les personnes marginalisées connaissent intimement et ce qui est admis scientifiquement», dit Gaïa Guenoun, coordonnatrice de recherche au laboratoire de Robert-Paul Juster.

«Nous avons travaillé avec des personnes trans et non binaires au Michigan, au Nebraska, dans l’Oregon et au Tennessee pour élargir les connaissances sur la stigmatisation et la résilience dans nos communautés», ajoute L. Zachary DuBois.

Les chercheurs ont recruté 124 personnes et les ont suivies de l’automne 2019 à l’été 2020.

Les résultats sont parus dans ce que les chercheurs qualifient de pire année de l’histoire juridique pour les personnes transgenres et la diversité de genre. En 2023, plus de 500 projets de loi dirigés contre les personnes trans ont été présentés aux États-Unis, soit le nombre le plus élevé pour la quatrième année d’affilée.

Jusqu’à récemment, les personnes transgenres et non binaires ont été généralement exclues de la recherche scientifique partiellement à cause d’une conception rigide du sexe et du genre comme caractères immuables et binaires, ce qui crée un biais dans la littérature scientifique, selon les auteurs de cette étude. Ce sont ces mêmes conceptions du sexe et du genre qui façonnent le contexte sociopolitique actuel et, par conséquent, la santé des personnes transgenres et non binaires.

À propos de cette étude

L’article «Gender minority stress and diurnal cortisol profiles among transgender and gender diverse people in the United States», par L. Zachary DuBois et ses collègues, a été publié le 7 janvier 2024 dans le numéro virtuel spécial sur la diversité de sexe et de genre de la revue Hormones and Behavior.

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