Quand la torche des Jeux olympiques de Montréal enflamme la créativité à l’UdeM

Les derniers relayeurs, Stéphane Préfontaine et Sandra Henderson, dans le Stade olympique de Montréal à la cérémonie d’ouverture des JO de 1976

Les derniers relayeurs, Stéphane Préfontaine et Sandra Henderson, dans le Stade olympique de Montréal à la cérémonie d’ouverture des JO de 1976

Crédit : 1976 / Comité International Olympique (CIO). PHO10012412.

En 5 secondes

La Faculté des arts et des sciences organise une conférence sur l’idéal olympique le 17 juin. Ce sera l’occasion de revisiter l’histoire de la torche des JO de 1976, qui a été créée à l’UdeM.

Tout est propice à la créativité à l’Université de Montréal. Pour preuve, lors du déménagement du Département de chimie du campus de la montagne au campus MIL, on a trouvé le prototype de la torche des Jeux olympiques de Montréal, créée par le professeur retraité Michel Dallaire, de l’École de design industriel.  

Il n’en fallait pas plus pour que la Faculté des arts et des sciences décide d’organiser un évènement grand public qui regroupera quatre conférenciers de renom autour du thème «L’idéal olympique est-il réalisable?».

La conférence, qui aura lieu le lundi 17 juin à 17 h au Complexe des sciences du campus MIL, réunira Christiane Ayotte, qui dirigeait jusqu’à récemment le Laboratoire de contrôle du dopage, Geneviève Mageau, du Département de psychologie, Frédéric Mérand, directeur du Département de science politique, ainsi que l’animatrice et journaliste Marie-José Turcotte. La rencontre sera animée par la journaliste Chantal Srivastava.

Un symbole fort conçu dans les murs de l’UdeM

Torche olympique

Le plan de fabrication du prototype de la torche olympique des JO de Montréal, dessiné par Michel Dallaire

Crédit : Comité International des Jeux Olympiques

Le 17 juillet 1976, des trompettes annoncent sur un air solennel l’arrivée de la flamme olympique dans le stade tout neuf – et inachevé – de Montréal. Les 73 000 spectateurs présents à la cérémonie d’ouverture se lèvent pour accueillir les coureurs portant la torche qui alimente la flamme venue du temple d’Héra à Olympie, en Grèce. 

Très peu de gens dans le stade le savent, mais cette torche a été conçue dans les murs de l’Université de Montréal grâce à un travail d’équipe interdépartemental. 

Deux ans plus tôt, en 1974, le professeur de l’École de design industriel Michel Dallaire se voit confier par le comité organisateur des Jeux olympiques le mandat de créer la torche en vue des Jeux de Montréal. Le réputé designer – c’est lui qui a notamment conçu le BIXI! – amorce alors une analyse des torches ayant servi aux huit JO précédents pour ensuite élaborer un concept. Le 29 septembre de l’année suivante, il dépose le dessin technique qui servira à la fabrication de la torche officielle. 

En parallèle, il est aussi celui qui a dessiné les pièces de mobilier du Village olympique, où séjournent les 12 000 athlètes venus de partout dans le monde.

Une torche boudée par le maire Jean Drapeau

Michel Dallaire avec André Combey, artificier et machiniste.

Michel Dallaire et André Combey

Michel Dallaire confie son plan à André Combey, responsable des ateliers de prototypage à l'UdeM. Artificier et machiniste, c’est lui qui fabrique le prototype qui sera présenté au maire de Montréal de l’époque, Jean Drapeau. 

«Lorsqu’il a vu le prototype, M. Drapeau a été déçu, relate Michel Dallaire. Il attendait une pièce d’orfèvrerie, j’arrivais avec un outil à transporter du feu: c’était un long manche rouge surmonté d’un fourneau noir qui avait pour but de mettre la flamme en évidence, car c’est elle qui est le symbole, pas la torche!» 

Le designer est quelque peu déstabilisé, mais lorsqu’il apprend que le directeur du relais canadien s’apprête à rencontrer son homologue athénien, il lui remet six exemplaires du prototype «malaimé». 

«Le comité olympique a été charmé par cette torche alimentée à l’huile d’olive, voilà un hommage au rameau d’olivier sauvage remis aux vainqueurs des jeux antiques», écrit-il dans le livre De l’idée à l’objet, publié en 2017.  

Le maire Drapeau n’a alors pas le choix d’accepter la proposition soumise par Michel Dallaire, qu’il tiendra à l’écart des réjouissances des Jeux…

Une flamme alimentée par de l’huile d’olive «dopée»

Lucien Piché

Lucien Piché

Crédit : Fondation Lucien Piché

Avant qu’il soit désigné comme torche officielle, le prototype doit répondre à un haut standard de visibilité.  

«Les Jeux de Munich en 1972 ont prouvé qu’une flamme au butane est invisible sur le bleu du ciel, tandis que le kérosène et le phosphore, utilisés pour les Jeux de Mexico et ceux de Tokyo, avaient provoqué des brûlures», se souvient Michel Dallaire.  

Se remémorant l’image dans sa jeunesse de la flamme orange vif provoquée par le versement de frites crues dans l’huile de la friteuse, il a eu l’idée d’essayer l’huile d’olive pour alimenter la torche. 

«Ça fonctionnait, mais l’huile d’olive étant peu volatile, l'allumage de la torche prototype pouvait prendre jusqu'à une minute, ce qui nous semblait beaucoup trop long», ajoute-t-il. 

Il fait alors appel à Lucien Piché, professeur au Département de chimie, où il a été directeur de 1951 à 1959. 

«Michel Dallaire a demandé à M. Piché s’il pouvait “droguer” l’huile d’olive pour faciliter l’allumage de la flamme et la rendre plus stable», se rappelle Joseph Hubert, professeur retraité de chimie, qui était voisin de bureau de Lucien Piché.

Quelques jours plus tard, Lucien Piché avait trouvé la formule: la flamme serait alimentée par un mélange constitué à 50 % d’huile d’olive, 20 % d’heptane et 30 % de nitropropane! 

«Le professeur Piché a joué un rôle important, confie Michel Dallaire. C’était la première fois qu’on utilisait l’huile d’olive et, d’entrée de jeu, il m’avait dit que cette huile n’était pas suffisamment volatile pour créer une flamme orangée comme je le souhaitais: Lucien Piché a sauvé la situation grâce à ses grandes connaissances.»

Cinq torches en or!

Michel Dallaire

Michel Dallaire et sa torche plaquée or

Crédit : Courtoisie

Au total, la torche olympique créée par Michel Dallaire a été produite à 2000 exemplaires: 1200 ont été utilisées pour le relais de la flamme entre Ottawa et Montréal, tandis que les autres ont été distribuées aux différents dignitaires venus assister aux Jeux.  

«Chaque porteur de la flamme – qui franchissait une distance d’environ un kilomètre, que ce soit à pied, à vélo ou en canot – a gardé sa torche en souvenir, tel que le veut la tradition olympique», relate le designer. 

Une version plaquée or de la torche a aussi été fabriquée en cinq exemplaires, qui ont été remis aux très hauts dignitaires, dont Thomas Bach, le grand patron du Comité international olympique, et le prince Charles.  

La dernière torche en or était destinée au maire Jean Drapeau. Or, sa secrétaire a refusé le cadeau puisqu'il valait plus de 35 dollars et que la réglementation municipale interdisait d'accepter un présent d'une plus grande valeur.

C’est ainsi que Michel Dallaire a hérité d’une version en or de sa propre création!

AIDE-MÉMOIRE

Quoi? Conférence «L’idéal olympique est-il réalisable?» 

Quand? Le lundi 17 juin à 17 h 

Où? Amphithéâtre A-1502.1 du Complexe des sciences au campus MIL (1375, avenue Thérèse-Lavoie-Roux, à Montréal)  

Entrée gratuite 

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