E itaskweak: révéler la mémoire et redécouvrir le territoire d’Opitciwan
- UdeMNouvelles
Le 9 septembre 2024
- Virginie Soffer
Une plateforme numérique pour la transmission intergénérationnelle des savoirs liés au territoire sera développée conjointement par des chercheurs de l’UdeM et des Atikamekw d’Opitciwan.
E itaskweak, une nouvelle plateforme numérique, sera développée pour les jeunes d’Opitciwan afin qu’ils puissent explorer leur territoire ainsi que ses représentations culturelles et historiques. Elle servira également d’outil pour diffuser des connaissances liées au territoire, aux paysages, à la nature et à la biodiversité.
Ce projet, qui constitue la deuxième phase d’E itaskweak: révéler la mémoire, redécouvrir le territoire d’Opitciwan, s’inscrit dans une dynamique de réappropriation et de transmission de savoirs ancestraux. Il est porté par le Conseil des Atikamekw d’Opitciwan, en partenariat avec la Chaire en paysage et environnement de l’Université de Montréal. Il bénéficie du soutien du Secrétariat aux relations avec les Premières Nations et les Inuit, du Conseil de la nation Atikamekw, du Conseil en éducation des Premières Nations, ainsi que du Vice-rectorat à la recherche, à la découverte, à la création et à l’innovation de l’UdeM.
Une exploration du territoire et des savoirs qui y sont liés
L’expression itaskweak désigne, en atikamekw, ce qui forme la forêt: les arbres, les plantes, les animaux, l’espace et l’immensité, tout en intégrant la notion de guide à travers le territoire.
Le projet E itaskweak repose sur des travaux menés par des équipes de recherche depuis les années 1980 et sur des savoirs et récits transmis oralement par les aînés au fil des générations ainsi que sur des activités contemporaines (expéditions, documents visuels et écrits, forums de discussion, etc.). Qu’ils prennent la forme de cartes, de dessins, de photos, de textes ou de témoignages oraux, ces savoirs d’hier comme d’aujourd’hui sont désormais à la disposition du Conseil des Atikamekw d’Opitciwan, qui peut les utiliser pour créer des activités culturelles et sociales destinées notamment aux jeunes de la communauté.
Cette initiative vise à ce que les jeunes d’Opitciwan renouent avec leur environnement naturel et culturel. Sylvain Paquette, professeur à l’École d’urbanisme et d’architecture de paysage de l’Université de Montréal et titulaire de la Chaire en paysage et environnement de l’UdeM, souligne l’importance du projet dans la transmission intergénérationnelle: «Les jeunes seront amenés à explorer le territoire d’Opitciwan et à découvrir les savoirs transmis par les aînés. Le projet permet cette transmission dans une optique pédagogique.»
Une plateforme numérique à la fine pointe de la technologie
Une plateforme numérique sophistiquée sera conçue pour offrir une représentation territoriale des connaissances présentées, en parfaite harmonie avec les systèmes de savoirs de la communauté atikamekw.
Cette plateforme, véritable pont entre le passé et le futur, permettra aux jeunes d’accéder à une vaste base de données comprenant des archives cartographiques, documentaires, visuelles et sonores. Elle servira également d’outil pédagogique au personnel enseignant, lui permettant de valoriser le territoire et les connaissances liées à celui-ci dans le contexte des apprentissages. On espère qu’elle donnera le goût aux jeunes d’aller explorer le territoire réel, d’en savoir plus sur le milieu naturel du village et le territoire tout autour.
«Nous aborderons par exemple les transformations du sol depuis les périodes glaciaires», dit l’équipe de recherche.
Un magistral travail collaboratif
Le projet est réalisé en collaboration avec le Centre d’expertise numérique pour la recherche de l’Université de Montréal, les contenus étant élaborés avec les membres de la communauté atikamekw.
Sylvain Paquette explique: «Nous ne sommes pas les experts du territoire atikamekw; ce sont les membres de la communauté, comme Noella Chachai, agente culturelle, et Véronique Chachai, technolinguiste, qui, sous la direction de Gerthie Chachai, participent à la création des contenus en collaboration avec les secteurs du territoire – sous la direction de Louis-Michel Dubé – et de l’aménagement et de l’environnement – sous la direction de Marie-Soleil Weizineau. Notre rôle, au sein de la Chaire en paysage et environnement de l’Université de Montréal, sera d’aider à définir les priorités, d’assurer l’adéquation des contenus avec la communauté et d’imaginer des scénarios d’utilisation.»
Il poursuit: «Grâce à cette collaboration, nous avons le privilège d’accéder à ces connaissances à propos du territoire, ce qui nous permet d’intégrer les préoccupations des communautés autochtones dans nos recherches.»
Une nouvelle vision du paysage
«Le paysage n’est pas qu’un décor ou un point de vue. C’est quelque chose à la fois extérieur et intérieur à nous. Nous nommons un paysage en fonction de notre appréciation ou de notre relation avec celui-ci, touchant à des registres de valorisations sociales et culturelles. Collaborer avec le Conseil des Atikamekw nous permet d’adopter un regard unique sur la relation avec le territoire», observe Sylvain Paquette.
Il précise également que le terme paysage n’a pas d’équivalent direct en langue atikamekw. Différents mots qualifient le territoire et la toponymie offre la possibilité de comprendre la relation des membres de la communauté avec celui-ci. Il conclut: «Ce projet s’inscrit aussi dans les démarches de décolonisation des savoirs et représente une occasion d’en apprendre énormément.»
Une délégation du Conseil des Atikamekw d’Opitciwan à l’UdeM
À l’occasion du lancement de la phase 2 du projet E itaskweak, une délégation du Conseil des Atikamekw d’Opitciwan a été accueillie à l’Université de Montréal le 9 septembre. Elle comprenait le chef Jean-Claude Mequish et les conseillers, la directrice générale du Conseil, les directeurs des secteurs de l’éducation, du territoire et de l’aménagement communautaire ainsi que de jeunes finissants du secondaire de l’école Mikisiw.
Des représentants du Vice-rectorat aux partenariats communautaires et internationaux de l’Université, des équipes du salon Uatik et de Cap campus ont accompagné les jeunes d’Opitciwan dans une visite-découverte de l’Université de Montréal.