Bruno Nkambeu: chercher pour soulager la douleur
Dans la série
Collations des grades 2025 Article 8 / 11
«J’ai toujours voulu être au four et au moulin; être utile et contribuer autant que faire se peut au soulagement de la douleur et à la santé des gens.»
Tel est le discours de Bruno Nkambeu, alors qu’il souligne cette semaine l’obtention de son doctorat en médecine vétérinaire axé sur la découverte de médicaments analgésiques.
Sous la supervision de Francis Beaudry, professeur au Département de biomédecine vétérinaire de l’Université de Montréal, Bruno Nkambeu a conçu une méthode unique au monde pour étudier la nociception – le processus physiologique par lequel le système nerveux détecte un stimulus potentiellement nocif et transmet l’information au cerveau.
Pour s’y rendre, il a d’abord fait une maîtrise en biologie des organismes animaux dans son pays d’origine – le Cameroun –, un certificat en technologie et innocuité des aliments, puis une maîtrise en pharmacologie vétérinaire. L’objectif: découvrir des manières d’apaiser la douleur chez les modèles animaux et, ultimement, chez les humains.
«Beaucoup de médicaments contre la douleur produisent des dépendances qui peuvent détruire des vies, des familles. Étant moi-même coureur de fond, je sais que cette discipline peut, dans certaines conditions, renforcer les muscles du dos, mais qu’elle s’accompagne aussi fréquemment de maux dorsaux. Je me suis toujours dit qu’il fallait trouver d’autres façons de faire pour soulager la douleur», estime le doctorant.
La médecine vétérinaire pensée pour l’humain
Bruno Nkambeu s’intéresse donc aux médicaments contre la douleur. S’il est associé à la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal, c’est qu’il a fait appel à un modèle animal – plus précisément le ver Caenorhabditis elegans (C. elegans) – pour élaborer de nouveaux analgésiques.
C. elegans est un minuscule nématode qui compte plus de 7600 gènes en commun avec le génome humain, en plus de présenter une structure et un fonctionnement qui s’apparentent à ceux des mammifères.
Dans sa thèse, le scientifique a mis au point une technique pour stimuler les nocicepteurs (les récepteurs de stimulus nocifs) chez C. elegans, qui sont homologues des récepteurs de la douleur chez les animaux de laboratoire, et ensuite pouvoir tester une variété de molécules potentiellement analgésiques.
«Par exemple, si nous avons un bassin de 1000 molécules “potentielles” à tester, cela voudrait dire qu’il faudrait énormément d’animaux pour toutes les mettre à l’essai, ce qui est discutable d’un point de vue éthique. Mais avec C. elegans, il est possible de réaliser un criblage rapide, de ne retenir que les molécules les plus prometteuses et ainsi d’accélérer la découverte de nouveaux médicaments», avance-t-il.
Puisque les nocicepteurs du ver réagissent de manière pharmacologiquement semblable à ceux des espèces utilisées dans la recherche de médicaments, cette approche contribue à limiter grandement le recours à l’expérimentation animale en laboratoire.
Un porte-étendard de la science
Depuis qu’il est tout petit, Bruno Nkambeu s’intéresse aux sciences et à la recherche. Alors qu’il est devenu chercheur lui-même, il souhaite maintenant communiquer cette passion aux plus jeunes générations.
«La passion de la science vient quand la première expérience est réussie», croit-il.
Animé par ce désir de partage, il travaille actuellement à simplifier davantage sa technique de stimulation de C. elegans pour pouvoir la présenter dans des écoles secondaires ou des cégeps. «Ce nématode est facile à manipuler et le matériel de stimulation thermique est simple. Pour le matériel de stimulation, j’aimerais créer une version encore plus avancée si j’ai le soutien financier nécessaire. Ensuite, il ne restera qu’à réfléchir à une façon d’automatiser à l’aide de l’intelligence artificielle le décomptage des C. elegans», résume Bruno Nkambeu.