Dans les trois pays ciblés, les obstacles à la santé sexuelle et reproductive sont multiples et imbriqués. La pauvreté, l’insécurité, les tabous socioculturels, la faiblesse des infrastructures et le manque de formation du personnel de la santé continuent de priver plusieurs milliers de femmes et de jeunes filles de leurs droits fondamentaux.
«Nous faisons face à des barrières géographiques et économiques importantes, mentionne Karina Dubois-Nguyen. Dans certaines zones, il n’y a simplement pas de services. Nous devons innover avec des cliniques mobiles, la télémédecine ou encore des approches communautaires adaptées aux réalités locales.»
Mais les obstacles ne sont pas seulement matériels. «Dans plusieurs communautés, parler de planification familiale ou de sexualité reste tabou, ajoute Claude Phanord. Il y a un énorme déficit d’information. Une partie de notre travail consiste à briser ces silences. Le tout survient alors que le système de santé se dégrade, avec un manque criant de soutien aux communautés migrantes déplacées – dont beaucoup de femmes enceintes – à la frontière avec la République dominicaine.»
Sur le plan juridique, les défis sont tout aussi considérables. «Dans plusieurs cas, les lois existent, mais ne sont pas appliquées, déplore Stelsie Angers. Avec le projet, nous allons travailler à la fois sur la formation des acteurs de la justice et sur la modernisation des cadres normatifs. Nous voulons que les droits sexuels et reproductifs cessent d’être théoriques pour devenir concrets.»
Pour y parvenir, les auteurs du projet «Ma santé, Mes droits / Sante Mwen, Dwa Mwen / Mi Salud, Mis Derechos» adoptent une approche intersectorielle. Ils prévoient entre autres renforcer des services de santé communautaires, proposer des formations pour le personnel de la santé, faire de la sensibilisation communautaire sur la santé reproductive et la prévention des violences, créer des comités de femmes qui soient des relais entre les communautés et les organisations et accompagner juridiquement les victimes de violences basées sur le genre.
Dans l’esprit du consortium, la réussite du projet repose avant tout sur la collaboration entre les échelons locaux et nationaux et sur la reconnaissance du savoir des communautés elles-mêmes. «Nous n’imposons pas des modèles venus d’ailleurs, insiste Karina Dubois-Nguyen. En collaboration avec les organisations publiques, nous souhaitons valoriser les savoirs locaux et travailler avec les parteras, les comadronas, les matrones. Ce sont elles qui ont la confiance des femmes dans leurs communautés.»