Une «boîte à outils» pour l’aide au diagnostic dans les maladies complexes

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Une équipe internationale dirigée par une chercheuse du CHU Sainte-Justine et de l'UdeM met au point un nouveau modèle mathématique pour améliorer la prise en charge des maladies complexes.

Alors que certaines maladies ont des causes connues, de nombreuses autres sont caractérisées par de multiples interactions anormales dont on ignore l’origine exacte.

Récemment, une équipe de recherche du CHU Sainte-Justine et de l’Université de Montréal ainsi que des universités Harvard, Stanford et de Californie à San Francisco a recouru à la bio-informatique pour produire un grand volume de données permettant de déconstruire et de reconstruire les réseaux d’interactions menant à une maladie et ainsi de mettre au jour de nouveaux phénotypes qui pourront orienter les cliniciens vers des stratégies thérapeutiques optimisées pour chaque patient.

Les résultats de l’étude sont présentés dans le journal Patterns publié par Cell Press.

Une «boîte à outils» pour l’aide au diagnostic

Morgan Craig

Les maladies complexes, en raison de leur étiologie multifactorielle, nécessitent de nouveaux outils capables d'exploiter de grands ensembles de données quantitatives pour esquisser l'équivalent d'un «réseau trophique» en écologie, c'est-à-dire un réseau d'interactions entre diverses cellules et protéines.

La construction de ce réseau informe sur les différences entre un individu sain et un individu malade et permet d’une part de repérer les phénotypes à l’œuvre dans la maladie et d’autre part de désigner des stratégies thérapeutiques potentielles.

«Ici, nous avons appliqué ces approches quantitatives à la thrombopénie cyclique (TC), une maladie du sang très rare et complexe», explique Morgan Craig, chercheuse au CHU Sainte-Justine et professeure à l’Université de Montréal.

Elle poursuit: «Notre étude se compose de trois sujets porteurs de biomarqueurs de la TC, dans laquelle plusieurs cellules et protéines subissent des oscillations anormales et mènent à une concentration plaquettaire déficiente dans le sang, ce qui correspond à la représentation clinique de la maladie. Cependant, un des sujets présentait des marqueurs biologiques atypiques.»

«Nous avons ensuite utilisé un ensemble de techniques mathématiques [dynamique empirique] qui, à partir de données longitudinales, nous ont permis de décortiquer la dynamique des interactions physiologiques anormales dans la maladie chez chaque patient, précise Madison Ski Krieger, premier auteur de l’étude. La mise au point de cette “boîte à outils” d’aide au diagnostic nous a menés vers la validation d’une intervention thérapeutique plausible.»

Selon la professeure Craig, «ce qui est vraiment nouveau ici, c'est que notre approche nous permet de distinguer les multiples phénotypes de la maladie en épluchant ses mécanismes physiopathologiques, indépendamment du fait qu'ils ont la même manifestation clinique. En d’autres mots, bien que les symptômes d’une maladie soient identiques, les mécanismes responsables de cette même maladie peuvent différer».

Cette notion expliquerait pourquoi certains médicaments ne fonctionnent pas chez certains patients.

Voir plus loin

«Ce qui est passionnant, c’est que cette approche quantitative a le potentiel d’être appliquée à de multiples troubles complexes et populations pour en améliorer notre compréhension et guider les cliniciens vers des cibles thérapeutiques personnalisées», conclut Morgan Craig.

L’équipe poursuit ses recherches en étudiant la résistance aux médicaments dans le cancer et en essayant de mieux comprendre les mécanismes sous-jacents de la COVID-19.

À propos de l’étude

L’article «A blueprint for identifying phenotypes and drug targets in complex disorders with empirical dynamics» a été publié dans le journal Patterns de Cell Press en novembre 2020. Le premier auteur est Madison Ski Krieger, postdoctorant au Département de biologie organique et évolutive de l’Université Harvard, alors qu’il était sous la codirection de Morgan Craig. L’auteure principale est Morgan Craig, chercheuse au CHU Sainte-Justine et professeure au Département de mathématiques et de statistique de l’Université de Montréal. L’étude a été financée par une subvention à la découverte et un supplément d’accélération à la découverte du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG), une bourse postdoctorale du CRSNG, une subvention des National Institutes of Health des États-Unis et une bourse de recherche à long terme du programme scientifique Frontières humaines.

À propos du Centre de recherche du CHU Sainte-Justine

Le Centre de recherche du CHU Sainte-Justine est un établissement phare en recherche mère-enfant affilié à l’Université de Montréal. Axé sur la découverte de moyens de prévention innovants, de traitements moins intrusifs et plus rapides et d’avenues prometteuses de médecine personnalisée, il réunit plus de 200 chercheurs, dont plus de 90 chercheurs cliniciens, ainsi que 500 étudiants de cycles supérieurs et postdoctorants. Le centre est partie intégrante du Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine, le plus grand centre mère-enfant au Canada.

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