La tradition pour retrouver la santé

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La prévalence du diabète est deux fois plus élevée chez les Autochtones que dans la population canadienne. En retrouvant le chemin de l’alimentation traditionnelle, on peut changer la situation.

«Il y a 50 ans, on répertoriait peu de cas de diabète chez les Premières Nations, car le mode de vie traditionnel – reposant sur la chasse, la pêche et la cueillette de petits fruits – contribuait à un meilleur état de santé global des individus, explique le professeur Pierre Haddad, spécialiste de l’activité biologique des extraits de plantes réputées antidiabétiques. Les cas d’obésité et de diabète ont explosé parmi les Premières Nations en raison de la disponibilité d’aliments transformés et aussi de la sédentarisation: la combinaison a entraîné une transition vers un mode de vie aux effets dévastateurs.»

Un changement néfaste

«Plus on va vers le nord au Québec, plus s’alimenter coûte cher, commente Pierre Haddad. Et comme les aliments riches en sel, en gras et en sucre sont moins coûteux et plus disponibles, les communautés des Premières Nations n’ont guère eu le choix que de se tourner vers les aliments transformés et ultratransformés, s’exposant de plus en plus au diabète.» Le professeur du Département de pharmacologie et physiologie de l’UdeM connaît bien le Nord québécois: depuis 2003, il s’y est rendu à maintes reprises pour y mener différents projets de recherche en lien avec le diabète dans les populations autochtones.

Retour à la tradition

Pierre Haddad

Crédit : Guillaume Bell

Dans le cadre d’une étude qu’il a amorcée en 2016 et qui se poursuit, Pierre Haddad cherche à évaluer les éléments susceptibles d’inciter les membres des communautés à revenir à de saines habitudes de vie ancrées dans la culture et les valeurs autochtones. Et l’un des points forts de cette culture est l’alimentation traditionnelle.

«Notre approche est centrée sur la culture des communautés et combine l’alimentation et la médecine traditionnelles – incluant les plantes médicinales – et un mode de vie plus actif axé, entre autres, sur la chasse et la pêche, la pratique de la marche en nature pour notamment récolter plantes et petits fruits, le canot et la danse», indique-t-il.

Près d’une centaine de personnes participent à l’étude, réparties dans trois communautés du Québec – celles des Innus de Mashteuiatsh (au Lac-Saint-Jean, près de Roberval), des Cris de Mistissini et des Naskapis de Kawawachikamach – et au sein de la nation des Squamish de la Colombie-Britannique.

Les programmes ont été élaborés par les services de santé locaux et les organismes communautaires, en collaboration avec les porteurs de savoirs de chacune des communautés et une vingtaine de chercheurs de l’Université d’Ottawa, l’Université Laval, l’Université du Québec en Outaouais et l’Université de Montréal. Outre Pierre Haddad, les autres chercheurs de l’UdeM sont Thora Martina Herrmann (géographie) et Alain Cuerrier (sciences biologiques).

Dans cette étude comparative, les modifications au mode de vie apportées par les participants sont évaluées à chaque saison, tout comme différents paramètres biochimiques liés à la santé cardiovasculaire. «Notre pari est que, en imbriquant l’intervention dans les valeurs culturelles des communautés et la reconnexion avec la nature, les participants adhéreront davantage aux nouvelles habitudes et s’en porteront mieux», conclut Pierre Haddad.

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