Climigrant: quand les changements climatiques entraînent des migrations
- UdeMNouvelles
Le 15 septembre 2022
- Virginie Soffer
Deux bandes dessinées sensibilisent aux effets des changements climatiques sur les populations et leur santé.
Ciara a 15 ans, elle habite dans l’ouest de l’île de Montréal et sa maison a été inondée ces dernières années. À l’autre bout du monde, en Océanie, la famille de Tiaho, qui vit à Kiribati, voit ses terres submergées par la montée des eaux. Nul n’est épargné par les changements climatiques.
Ces deux histoires fictives sont basées sur des faits bien réels et sont racontées en bande dessinée dans un projet de sensibilisation du Réseau de recherche en santé des populations du Québec (RRSPQ), financé par le Fonds de recherche du Québec – Santé. Un projet auquel a participé Lisa Merry, professeure à la Faculté des sciences infirmières de l’Université de Montréal, Matthew Hunt, professeur à l’École de physiothérapie et d’ergothérapie de l’Université McGill, Thierry Hurlimann, coordonnateur de l’axe Santé mondiale du RRSPQ, Tzvetelina Tzoneva, coordonnatrice de l’axe Éthique du RRSPQ, Sophie Schriever, agente de recherche du RRSPQ, Gabriella Kranz, ancienne coordonnatrice de l’axe Éthique du RRSPQ, et Sandra Dumais, illustratrice.
Quand une conférence se transforme en bandes dessinées
Le Réseau de recherche en santé des populations du Québec avait prévu organiser une conférence grand public sur les changements climatiques, les migrations (internes ou internationales) et leurs répercussions sur la santé. En raison de la pandémie, ce projet a dû être revu.
L’équipe de recherche explique qu’il a été décidé de créer un site Web présentant des histoires illustrées pour atteindre un public le plus large possible. Une multitude de références ont été ajoutées pour donner plus d’information. Le but: lancer un message de solidarité pour montrer que personne n’est à l’abri des changements climatiques et que leurs effets ne se font pas sentir qu’à l’autre bout du monde.
Kiribati, des îles du Pacifique englouties d’ici 25 ans
Tiaho, qui a aujourd’hui 55 ans, se souvient du temps où elle était enfant: «On pêchait, on jouait dans l’eau et l’on collectionnait les coquillages. La mer ne s’approchait jamais beaucoup, même pendant les hautes marées, et les plages étaient merveilleuses. Du sable blanc. On vivait au paradis. Il y avait des arbres verts partout, des palmiers, des mangroves. On se rendait à ma plage préférée et l’on nageait. Toutes les familles cuisinaient au bord de la plage. Cette plage n’existe plus aujourd’hui. Elle a disparu sous les eaux.»
En effet, plusieurs recherches démontrent que, avec le réchauffement climatique, le niveau de la mer s’élèvera à Kiribati de 9 à 28 cm en 2055 et que les îles qui la constituent seront englouties. Le lien entre migration et changements climatiques est on ne peut plus clair. En illustrant la situation précaire d’une population déjà vulnérable, l’équipe de recherche voulait souligner que les migrants climatiques ne bénéficient pour l’instant d’aucun statut légal.
Des conséquences aussi dans les pays du Nord
Les changements climatiques provoquent des déplacements de population à Kiribati. Mais pas seulement. À Montréal, dans l’Ouest-de-l’Île, certains habitants sont déjà partis vivre ailleurs, comme le raconte Ciara: «Certains de nos voisins sont déjà partis. Je ne suis pas sûre de vouloir partir – mon école, mes amis… Il faudrait tout quitter. Mais chaque année, l’anxiété de ma famille empire.» D’autres font le choix de rester: un choix difficile quand leur maison n’est plus assurable ou qu’il n’y a plus d’indemnités pour la réparer ou même l’abandonner.
Le réchauffement planétaire a de multiples effets sur la santé. «Notre eau potable, que nous avons toujours puisée dans nos puits, est contaminée chaque fois que nous sommes inondés. C’est un problème sérieux pour la santé de ma famille. L’eau des puits rend mes enfants malades. Malheureusement, ça arrive souvent», relate Tiaho.
À ces problèmes sur place s’ajoutent les enjeux de santé des migrants eux-mêmes pendant leur déplacement dans un autre pays ou dans une autre région. «Et c’est sans compter les problèmes d’anxiété. C’est vraiment tout un continuum», mentionne l’équipe de recherche.
Développements à venir
Climigrant, le site Web qui comprend ces deux bandes dessinées, est présenté en versions française et anglaise.
Pour le personnel enseignant, des livrets pédagogiques pourraient être ajoutés. L’équipe souhaiterait en effet offrir des outils d’accompagnement pour que ces histoires soient utilisées auprès des jeunes de manière générale dans les écoles ou dans les bibliothèques. Elle précise qu’il faut aussi agir contre l’écoanxiété et fournir des pistes de solution.