Un ouvrage collectif sur les inquiétudes du personnel enseignant face au projet de loi no 23

L'ouvrage comprend 35 chapitres de quelques pages, rédigés de façon simple, qui évoquent les risques de la réforme proposée par le ministre Drainville, en plus de traiter de gouvernance et données probantes, de réussite scolaire, de gestion des classes et, plus globalement, de la recherche en éducation.

L'ouvrage comprend 35 chapitres de quelques pages, rédigés de façon simple, qui évoquent les risques de la réforme proposée par le ministre Drainville, en plus de traiter de gouvernance et données probantes, de réussite scolaire, de gestion des classes et, plus globalement, de la recherche en éducation.

Crédit : Getty

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Un collectif d’universitaires publie un livre numérique gratuit qui vise à informer le grand public des dérives que pourrait entraîner la réforme prévue dans le projet de loi no 23 sur l’éducation.

Un collectif d’universitaires a lancé, le 11 septembre, un livre numérique gratuit intitulé Le PL 23 et l’INEE: excellence ou standardisation en éducation? afin d’informer le grand public des tenants et aboutissants du projet de loi no 23 déposé en mai par le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville. 

Selon le professeur Marc André Éthier, de la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université de Montréal et membre du comité directeur de l’ouvrage, l’idée d’écrire ce livre numérique vient d’un désir de partager avec le public, en un seul lieu accessible, les grandes idées et innovations des communautés professorale et de recherche en éducation pour en faire bénéficier le plus grand nombre de personnes «parce que cette réforme nous concerne tous et toutes». 

Ainsi, la cinquantaine d’auteurs et auteures y signent 35 chapitres de quelques pages, rédigés de façon simple, qui, réunis en 12 sections, expliquent notamment la réforme proposée par le ministre Drainville, en plus de traiter de gouvernance et données probantes, de réussite scolaire, de gestion des classes et, plus globalement, de la recherche en éducation.  

«Le livre est évolutif et ouvert, c’est-à-dire que des chapitres s’ajouteront ou seront révisés selon l’évolution des discussions parlementaires sur le projet de loi et les commentaires et suggestions du milieu scolaire», précise Marc André Éthier.

Une réforme «de surface»

Marc-André Éthier

Marc André Éthier

Crédit : Courtoisie

Par son projet de loi intitulé Loi modifiant principalement la Loi sur l’instruction publique et édictant la Loi sur l’Institut national d’excellence en éducation, le ministre entend «réformer» le système d’éducation. 

Le projet de loi prévoit, entre autres, une centralisation de différents pouvoirs dans les mains du ministre ainsi que la fermeture d’instances indépendantes tels le Conseil supérieur de l’éducation et le Comité d’agrément des programmes de formation à l’enseignement, qui seraient remplacés par l’Institut national d’excellence en éducation (INEE), dont le mandat serait de «promouvoir l’excellence des services de l’éducation préscolaire et de l’enseignement primaire et secondaire». 

Professeure à la Faculté des sciences de l’éducation de l’UdeM et coauteure de deux chapitres de l’ouvrage collectif, Mélanie Paré estime – à l’instar de ses collègues – que la réforme proposée est une réforme «de surface» qui ne règlera pas ce qu’elle prétend vouloir régler. 

«Avec la création de l’Institut national d’excellence en éducation, le ministre prétend qu’il règlera les problèmes de réussite scolaire en rendant accessibles les données probantes issues de la recherche en éducation, ce qui laisse sous-entendre que le personnel enseignant n’utilise pas les bonnes pratiques, déplore-t-elle. Or, le problème est que nous ne disposons pas des bonnes conditions pour les appliquer et que le projet de loi ne se préoccupe pas des difficultés vécues dans les écoles et dans les classes.»

Les élèves en difficulté exclus du projet de loi no 23

Mélanie Paré

Mélanie Paré

Crédit : Julie Durocher

L’ouvrage collectif met aussi en relief un important angle mort de la réforme proposée par le ministre Drainville, selon Marc André Éthier et Mélanie Paré. 

«Il est naïf de croire que le simple fait de rendre disponible la littérature scientifique en matière d’éducation règlera tout, sans se pencher sur les difficultés vécues sur le terrain: les enfants issus de l’immigration et ceux venant des milieux défavorisés sont totalement absents du projet de loi», regrette celle qui est membre du Comité québécois pour les jeunes en difficulté de comportement. 

«Avec la création de l’INEE, on essaie de faire croire au public que le fait de rendre accessibles les données probantes aiderait à améliorer la réussite scolaire, comme un claquement de doigts… C’est un raccourci intellectuel qui confine au charlatanisme», s’indigne Marc André Éthier.  

«Avec la mise en place de l’INEE, le gouvernement investirait dans une nouvelle structure plutôt que d’investir pour soutenir l’apprentissage et les activités parascolaires et de favoriser d’autres conditions qui contribuent réellement à la réussite, ajoute Mélanie Paré. Sans compter que les organismes qui financent et diffusent les résultats de la recherche en éducation existent déjà», dont le Fonds de recherche du Québec – Société et culture. 

«L’un des problèmes centraux en éducation est certes la pénurie de main-d’œuvre, mais une véritable réforme de l’éducation devrait voir à améliorer le sort des personnes qui sont chargées de l’éducation des élèves au quotidien, conclut Marc André Éthier. Les mauvaises conditions de travail découragent un grand pourcentage d’étudiants et étudiantes en sciences de l’éducation, qui abandonnent leurs études avant la fin, et font en sorte que les jeunes enseignantes et enseignants quittent la profession après seulement quelques années, tandis que ceux d’expérience prennent une retraite prématurée.»

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