IRIC: une décennie faste pour les molécules amenées en clinique

Plurifacultaire (médecine, pharmacie, arts et sciences), l’IRIC travaille à faire avancer autant la recherche fondamentale que la commercialisation.

Plurifacultaire (médecine, pharmacie, arts et sciences), l’IRIC travaille à faire avancer autant la recherche fondamentale que la commercialisation.

Crédit : IRIC

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Le modèle de fonctionnement de l’IRIC a permis d’amener plusieurs molécules en clinique, ce qui réjouit Michel Bouvier, à la tête de cet institut depuis 10 ans.

Une décennie à la direction générale de l’Institut de recherche en immunologie et en cancérologie (IRIC) de l’Université de Montréal a permis à Michel Bouvier, professeur au Département de biochimie et médecine moléculaire de l’UdeM, de voir plusieurs molécules faire l’objet d’essais cliniques. «C’est très rare dans le milieu de l’enseignement et de la recherche, affirme-t-il. Mais nous l’avons fait en établissant des partenariats avec l’industrie pharmaceutique et en créant des compagnies dérivées.»

Il mentionne par exemple ExCellThera, créée en 2015, sur la base des travaux de Guy Sauvageau en génétique moléculaire des cellules souches et d’Anne Marinier en chimie médicinale. L’entreprise élabore de nouvelles méthodes d’expansion de cellules souches sanguines à des fins thérapeutiques grâce à la molécule UM171.

«Des essais cliniques de phase III seront bientôt lancés, plus de 100 patients ont déjà été traités, plusieurs ont été littéralement sauvés», raconte fièrement Michel Bouvier.

Il y a aussi Epitopea, fondée en 2021 grâce aux travaux de Pierre Thibault en protéomique et spectrométrie de masse et à ceux de Claude Perreault en immunobiologie. L’entreprise met au point des immunothérapies pour traiter les différents types de cancers en ciblant une nouvelle classe d’antigènes.

La compagnie française Domain Therapeutics, qui reprend les travaux du laboratoire de Michel Bouvier, a pour sa part ouvert une filiale à Montréal en 2014. Elle se concentre sur le potentiel thérapeutique des récepteurs couplés aux protéines G (RCPG).

«Les RCPG forment la plus grande famille de récepteurs – ils sont plus de 800 – et pas moins d’un tiers des médicaments de prescription agissent sur eux, explique Michel Bouvier. Mon laboratoire continue de concevoir de nouveaux outils pour mieux comprendre comment se transmettent les signaux afin de créer des médicaments plus efficaces avec moins d’effets secondaires.»

Ainsi, récemment, son laboratoire a réalisé le profil de signalisation des ligands du récepteur GLPI que cible le médicament contre le diabète Ozempic, qui fait beaucoup parler de lui en ce moment pour son effet amaigrissant.

Pour effectuer ce travail de caractérisation, l’équipe de Michel Bouvier utilise la bio-informatique, la science informatique et l’intelligence artificielle. «Nous avons d’ailleurs beaucoup développé dans les dernières années cet axe à l’IRIC pour la découverte de médicaments, notamment par une collaboration étroite avec Mila [l’Institut québécois d’intelligence artificielle]», indique Michel Bouvier.

Recherche fondamentale et commercialisation

Michel Bouvier

Michel Bouvier

Crédit : Université de Montréal

La structure de fonctionnement de l’IRIC, unique au Canada, n’est pas étrangère à son succès, aux yeux de Michel Bouvier.

Plurifacultaire (médecine, pharmacie, arts et sciences), l’IRIC travaille à faire avancer autant la recherche fondamentale que la commercialisation. Convaincu que la recherche fondamentale de pointe et la maturation des découvertes pour les amener sur le marché et au chevet des patients peuvent être synergiques, Michel Bouvier s’est joint à l’équipe de l’IRIC peu de temps après sa fondation, en 2003, par Guy Sauvageau. Avec Anne Marinier, Michel Bouvier a ensuite cofondé l’Unité de découverte de médicaments.

Si c’était important pour lui de transformer les découvertes du milieu universitaire en solutions thérapeutiques, il voulait aussi que les universités puissent bénéficier financièrement de ces succès. Pour y arriver, il a travaillé à fonder IRICoR (IRIC – Commercialisation de la recherche), un organisme à but non lucratif axé sur la découverte et la commercialisation de thérapies innovantes. Puis, il en a pris la direction.

«Je travaillais déjà en collaboration avec l’industrie pharmaceutique et cette expérience m’a aidé à établir plusieurs ententes avec elle, raconte Michel Bouvier. Ainsi, nous avons pu aller chercher des revenus importants pour l’Université et l’IRIC, ce qui permet des réinvestissements dans la recherche.»

En même temps qu’il dirigeait IRICoR, il est devenu directeur général associé de l’IRIC alors que Marc Therrien est devenu directeur scientifique associé. «Lorsque Guy Sauvageau a terminé ses deux mandats à la tête de l’IRIC en 2014, je l’ai remplacé», dit Michel Bouvier.

Attirer les meilleurs talents

Depuis l’arrivée de Michel Bouvier à la direction générale de l’IRIC, l’Institut organise chaque année le Gala Audace en vue de contribuer à financer des découvertes pour lutter contre le cancer. Au fil des ans, cette soirée a permis d’amasser huit millions de dollars.

Ces ressources permettent notamment à l’IRIC d’occuper une position favorable pour recruter les meilleurs talents. Par exemple, elles rendent possible l’actualisation des installations de recherche de pointe mises en place dès la fondation de l’IRIC. «Les 11 plateformes technologiques sont utilisées par les communautés de l’UdeM et de la recherche de Montréal et d’ailleurs au Canada, signale Michel Bouvier. C’est important pour créer un environnement stimulant pour les étudiants, les stagiaires postdoctoraux et les chercheurs.»

Il mentionne aussi l’importance de bien encadrer la relève, un défi qu’il relevait avec Marc Therrien, qui a terminé son mandat l’an dernier à titre de directeur scientifique.

Michel Bouvier souligne d’ailleurs le fonctionnement très collégial de l’IRIC: «Une assemblée se tient chaque mois avec tous les chercheurs et chercheuses et nous discutons de notre vision et des décisions à prendre. Les gens se sentent parties prenantes à l’IRIC.»

Alors qu’il termine son mandat de direction générale, il espère que le modèle particulier de l’IRIC continuera de progresser. «Collectivement, il faudra continuer à déployer des efforts et à se montrer audacieux, encore plus s’il le faut, pour voir d’autres belles découvertes sortir de l'Université pour aller vers le traitement des patients», conclut-il.

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