Surveiller la progression de virus d’après des cas de maladie de Carré chez le renard

La maladie de Carré a frappé la population urbaine de renards roux de Berlin entre 2008 et 2013.

La maladie de Carré a frappé la population urbaine de renards roux de Berlin entre 2008 et 2013.

Crédit : Getty

En 5 secondes

Le professeur Timothée Poisot et son équipe tentent d’élaborer une carte des maladies de la faune d’après des données sur les cas de maladie de Carré chez le renard recensés à Berlin, en Allemagne.

Si les bases de données concernant les maladies humaines et leur évolution sont centralisées depuis un bon moment, ce n’est pas le cas pour les maladies affectant les animaux sauvages. Pourtant, ces dernières sont souvent la source de maladies émergentes chez les humains, comme ce fut le cas pour la COVID-19. 

Il existe toutefois un projet qui pourrait contribuer à établir un système de centralisation des données sur ces affections animales: la plateforme Pharos, où sont rassemblées des données de détection positives et négatives de toutes sortes de maladies de la faune. 

Parmi ces données se trouvent des informations collectées lors de deux vagues épidémiques de la maladie de Carré (aussi appelée distemper), causée par le virus du même nom, qui ont frappé la population urbaine de renards roux de Berlin entre 2008 et 2013. Ces données comportent des renseignements sérologiques sur 778 carcasses de renards urbains géolocalisées et recueillies par le laboratoire d’État de Berlin-Brandebourg. L’âge et le sexe de ces animaux morts sont aussi connus.

Des données brutes à rassembler en tableau de bord

Cole Brookson et Ariane Bussières-Fournel

Cole Brookson et Ariane Bussières-Fournel

Crédit : Courtoisie

Ces données sont précieuses aux yeux du professeur Timothée Poisot, du Département de sciences biologiques de l’Université de Montréal. Cet été, il dirige une petite équipe chargée d’analyser la possibilité de transformer ces données de surveillance brutes en tableau de bord qui présenterait des indicateurs de risque, une sorte de «Météomédia des maladies de la faune», illustre-t-il. 

Ainsi Cole Brookson, doctorant de l’Université Yale à New Haven, au Connecticut, et Ariane Bussières-Fournel, étudiante du baccalauréat en sciences biologiques à l’UdeM, verront à départager les données à inclure ou à exclure du modèle à élaborer, puis à les standardiser et à les classer.  

La situation à Berlin a ceci d’intéressant que les données sur les cas de maladie de Carré chez le Vulpes vulpes sont suffisamment nombreuses pour permettre d’effectuer des calculs plus précis. 

«Il y a eu des cas de maladie de Carré dans des milieux très urbanisés de Berlin, ce qui a permis d’obtenir des jeux de données qui nous informent sur la qualité des données nécessaires pour créer des modèles qui pourront renseigner les décideurs publics et les habitants sur la prévalence du virus selon une géographie déterminée», souligne Timothée Poisot.

Une standardisation à implanter

Les données de Pharos comportent des renseignements sérologiques sur 778 carcasses de renards urbains géolocalisées et recueillies par le laboratoire d’État de Berlin-Brandebourg.

Crédit : Pharos/Mapbox

Pour Cole Brookson, le projet de Timothée Poisot vise à démontrer l’importance de la standardisation des données et de leur partage sur une plateforme afin qu’un plus grand nombre de gens puissent les utiliser. 

«La standardisation est un élément central dans l’élaboration d’un outil de surveillance tel le tableau de bord que nous tentons de créer, car les données proviennent de différentes sources qui n’ont pas nécessairement les mêmes paramètres de collecte et de partage», affirme le doctorant. 

«La standardisation permettra aussi de rendre les données interactives, puisque nous nous appuierons sur des modèles statistiques qui effectueront les calculs permettant de prédire l’évolution des maladies des animaux de la faune – comme la rage chez certains mammifères dans la région des Cantons-de-l’Est au Québec, conclut Timothée Poisot. De cette façon, les tableaux de bord pourront servir à la prise de décision et à informer le public du risque d’une maladie dans une région particulière.»

La maladie de Carré en bref

Très présente au Québec, la maladie de Carré touche surtout les canidés, dont les chiens, les coyotes, les loups et les renards.

Crédit : Getty

La maladie de Carré est une infection virale souvent mortelle chez les animaux sauvages. Très fréquente au Québec, elle affecte principalement les canidés (chiens, coyotes, renards, loups) ainsi que les ratons laveurs et les mouffettes. La maladie de Carré n’est pas transmissible à l’humain. 

Le virus de Carré se propage principalement par les sécrétions nasales et oculaires des animaux infectés. Les symptômes peuvent varier d'une infection à l'autre, mais ils comprennent généralement de la fièvre, une perte d'appétit, la toux, une conjonctivite, un écoulement nasal, des vomissements, de la diarrhée et des convulsions. Dans les cas graves, l'infection peut entraîner une pneumonie, des troubles neurologiques, voire la mort. 

La vaccination est la meilleure méthode de prévention contre le virus de Carré chez les animaux domestiques. Les chiens sont régulièrement vaccinés contre cette maladie dès leur plus jeune âge et les rappels sont nécessaires pour maintenir une protection continue. 

Source: Gouvernement du Québec.