APS: Nous ne disposons pas de données exhaustives à ce sujet, puisque les inscriptions reposent sur une auto-identification volontaire. Il faut respecter le fait que certaines personnes ne se sentent pas à l’aise de déclarer leur identité autochtone, d'où le besoin d'accentuer le sentiment de sécurité des membres autochtones de notre communauté. Nous savons que, bon an, mal an, nous accueillons une centaine d'étudiantes et d'étudiants autochtones.
Les défis que ces personnes doivent relever sont très variés parce qu’il n’y a pas qu’une seule réalité autochtone. Celles et ceux qui habitaient déjà en ville ne sont pas confrontés aux mêmes défis que ceux et celles qui viennent de communautés plus éloignées. Mais de façon générale, une certaine insécurité culturelle est vécue, car ils ne se reconnaissent pas dans le matériel pédagogique et il y a peu ou pas de références aux réalités autochtones dans leur programme d’études.
VA: La question de la visibilité des Autochtones dans notre établissement est centrale. J’ai été très touchée par l’allocution que Joséphine Bacon a prononcée en recevant son doctorat honoris causa en août. Elle y a abordé la visibilité sur un ton humoristique en ouverture, mais a ensuite souligné, après être revenue sur son parcours d’enseignante de la langue innue à l’Université de Montréal, à quel point cet honneur qui lui était rendu marquait le fait que les Autochtones ne nous sont pas invisibles. «Même si l’on ne s’est pas fait une beauté, a-t-elle dit, vous nous avez remarqués.»
Notre ambition est qu’une fois l’objectif de sécurisation atteint, chaque membre de la communauté se sente capable de s’engager dans la réconciliation avec les personnes issues des Premiers Peuples, que tous et toutes aient fait l'effort d'apprendre, étudiants et étudiantes, membres du personnel de soutien et du corps enseignant. Notre responsabilité est immense. N’oublions pas les mots de la poète: «Je me suis faite belle pour qu’on remarque la moelle de mes os, survivante d’un récit qu’on ne raconte pas.»